Tout est bon l’année du cochon

La danse du Lion à Hong Kong

Le nouvel an chinois

Le calendrier chinois est lunaire et la nouvelle lune est le premier jour de chaque mois. Cette année, en Chine, la nouvelle année à commencé le 5 février et nous débutons maintenant l’année du cochon. En Chine, nous disons chunjie 春节, c’est la fête du printemps, le festival du printemps, qui marque le début de la nouvelle année. Il s’agit de dire au revoir au passé et d’accueillir le présent, la nouveauté.
Cette année, je suis allé passer le nouvel an chinois à Shulan, vers Jilin, c’est un peu le pôle nord de la Chine. Et je profite de cette période pour parler des coutumes, des traditions qui ont lieu à cette époque.
Un peu comme à Noël en Europe, les gens décorent leurs maisons avec des guirlandes, des lanternes rouges, des papiers découpés. Le cochon est bien sûr souvent représenté, mais il y a aussi le poisson qui est symbole de prospérité et d’abondance.
préparation des chunlian à Shenzhen
Les chinois préparent également les chunlian 春联, ce sont des phrases écrites, calligraphiées, sur du papier rouge, des inscriptions parallèles, qui sont colées à l’entrée des maisons pour apporter bonheur et prospérité. Il est possible de les faire soi-même ou de les acheter toutes faites par des gens plus talentueux dans la beauté de la calligraphie.
Le caractère fu 福 est à l’honneur, ce mot signifie bonheur. Nous en avons un collé sur notre porte d’entrée.
Dans la semaine avant le nouvel an, il y a donc des stands dans la rue, ils vendent toutes sortes de décorations, les fameux chulian, des peluches cochons, et aussi des pétards et des feux d’artifice, dans les villes où cela est autorisé. 
A Shenzhen, on pouvait aussi acheter des mandariniers. Il y en a maintenant à l’entrée de tous les magasins, les boutiques, les hôtels et restaurants, et devant les immeubles. C’est une tradition du Guangdong, car à Jilin, il n’y avait pas de mandariniers, d’ailleurs, ils ne supporteraient pas le froid.
Une autre tradition importante est la danse du lion, ou la danse du qilin, ou la danse de la licorne. Il s’agit en fait d’un drôle d’animal mythologique et deux danseurs revêtent un costume de cet animal légendaire. C’est plutôt une tradition du sud de la Chine m’indique little miss tiny, mais elle est aussi pratiquée en Asie du Sud Est et par la diaspora chinoise en Europe et en Amérique du Nord. C’est à Hong Kong, en revenant de Jilin, que nous avons assisté à l’une de ces danses. Le lion se dandine en musique, il cligne des yeux, boit de la bière et attrape de l’argent offert par des commerces et restaurants alentour. Le lion peut aussi être associé au monstre Nian, un animal mythique et féroce qu’il faut effrayer en faisant du bruit, souvenez-vous, je vous en avais parlé l’année dernière.
De passage à Hong kong
Les chinois ne s’offrent pas des cadeaux comme on le ferait à Noël, mais de l’argent dans des enveloppes rouges, les hongbao 红包. Evidemment, avec la modernité, il y a maintenant des applications sur le téléphone pour s’envoyer des hongbao. C’est un peu codifié, les montants des hongbao varient suivant les régions, on en offre surtout aux enfants, mais aussi aux personnes célibataires, des plus gros montants en famille, plus petit entre collègues. Il est préférable que le montant contienne un 8, car c’est un signe porte bonheur, mais surtout pas un 4 car sa prononciation ressemble à celle du mot mort.

Bienvenue chez les ch'tis - c'est le nord !

Le nouvel an chinois est surtout une fête de familles, c’est ce qui est le plus important. Il y a une semaine de vacances à cette occasion, et pour de nombreux chinois, cela sera les seules vacances de l’année. Cette occasion est ainsi une période d’intense mouvement de population, la plus grande migration annuelle du monde, chacun retournant voir sa famille dans sa ville natale.
Avec little miss tiny, nous sommes donc allés dans le nord de la Chine. Elle m’avait d’abord averti qu’il y aurait des repas interminables et des enchaînements de visites. Cela a débuté dès notre arrivée. En plus, comme c’est ma première fois, je suis un invité un peu spécial. La veille du nouvel an, le repas commence assez tôt dans l’après-midi, avec les parents de little miss tiny, ses sœurs et leur mari respectif. L’intégralité du repas est servie en même temps, une kyrielle de plats de viandes, de poissons, de fruits de mers et de légumes, disposés de part et d’autres de la table. Mais attention, il faut qu’il y ait un nombre pair de plats différents ! La famille discute tout au long du repas, parfois ils se marrent quand l’un d’entre eux raconte une blague. Je ne comprends pas tout et j’ai quelques moments de solitude même si little miss tiny m’explique un peu de ce qu’il se passe.
Le soir, à la télé, il y a un gala annuel sur la chaîne CCTV, la chaîne principale avec des chants et des danses. Personne ne le regarde vraiment, mais il sert de bruit de fond pendant le repas et la soirée.
Après le repas, certains commencent des parties endiablées de mah-jong, puis avant minuit, nous préparons des jiaozi, les fameux raviolis chinois farcis à la viande et aux légumes puis bouillis. La tradition veut que tout le monde mange des jiaozi à minuit, même si nous sommes déjà copieusement repus du repas qu’on vient de terminer ! On a pris soin de mettre une pièce dans un nombre limité de jiaozi, un peu comme une fève dans la galette. Celui qui tombe dessus, en se servant dans le plat par hasard, passera ainsi une belle année. C’est un signe de bons présages.
Préparation des jiaozi
Le lendemain, nous déjeunons un peu tard, des jiaozi et des restants de la veille, puis les hostilités commencent, il faut de nouveau préparer le repas. Cette fois, des oncles et des tantes sont invités, il y a donc plus de monde que la veille. Nous mangeons une bonne partie de la journée et il faut trinquer tout au long du repas de baijiu 白酒, cet alcool blanc de riz que je n’aime pas. Je bois donc plutôt de la bière et dit ganbei avec tout le monde, parfois, il faut boire cul sec, mais on me dit que je suis un petit joueur parce que la bière ce n’est pas fort. Le baijiu, c'est un alcool de vie, à base de sorgho et de riz, le taux d'alcool est dans les 45°, ce n'est pas très bon, mais le papa de little mis tiny le prépare lui-même.
Le soir, nous sortons pour aller sur la place principale de Shulan. Il y a de jolies illuminations, des guirlandes de lumière dans les arbres, c’est un peu comme à Noël. Sur la place, il y a de grandes sculptures glacées qui sont également illuminées. Il fait particulièrement froid, ils nous mettent des -25°C, et la peau de mon visage retrouve des sensations que je n’avais plus éprouvées depuis mon départ du Canada
Nous nous amusons à lancer quelques pétards, d’autres font la même chose tout autour de nous. Certains sont monstrueux et font un bruit faramineux. Le bébé qui est le neveu de little miss tiny est tout effrayé. Mais il faut faire le plus de bruit possible pour effrayer le monstre nian, mais aussi pour éloigner le mauvais sort. Il y a aussi des feux d’artifices qui jaillissent de toute part. Le tintamarre durera toute la nuit. Dans les grandes villes comme Pékin, Shanghai ou Shenzhen, les pétards et feux d’artifice sont interdits pour des raisons de sécurité et d’environnement. Mais à Shulan, il n’y a pas de limite. Le lendemain, les cadavres et détritus de pétards jonchent rues et trottoirs. Ils seront rejoints par de nouveaux venus la nuit suivante.
Le jour suivant, nous nous réveillons au son des pétards puis nous nous préparons pour aller dans une autre famille, il faut faire le tour des oncles, des tantes dans tout le village. Mais il ne faut pas arriver chez quelqu’un les mains vides et nous nous arrêtons d’abord à la superette au coin de la rue pour acheter des fruits. Puis, partout nous mangeons, nous buvons, nous bavardons, nous chantons, nous échangeons des vœux et des hongbao. Bref, tout le monde devient copain comme cochon. Quand tout le monde est repu, certains font la sieste, en particulier les plus bourrés, avant de rentrer à la maison ou de reprendre à manger à nouveau.
Les gens du nord
Dans la maison du village, nous sommes installés sur le kang 炕, une estrade surélevée qui est chauffée par le dessous. Nous pouvons manger, assis en tailleur, tout en se faisant chauffer les fesses. Les plats sont installés sur une table basse ou à même le sol. Le kang est en fait la pièce principale de la maison rurale. La nuit, les habitants dorment ici, sur leur kang. C’est comme un lit chauffé mais il n’y a pas de matelas. Les parents de little miss tiny habitent maintenant en appartement, juste à quelques kilomètres de la maison familiale du village, et seulement depuis un an, dans un de ces nouveaux immeubles qui poussent à Shulan. La pièce principale de l’appartement moderne n’est pas équipée d’un kang, mais dans la chambre des parents de little miss tiny, il n’y a pas de lit, mais une plateforme qui est chauffé par le dessous grâce à un système électrique. Les parents de little miss tiny dorment sur cette surface dure, ils n’utilisent pas de matelas car ils pensent que ça leur fait mal au dos.
Avec little miss tiny, nous allons marcher dehors un moment. Le ciel est bleu mais il fait très froid. La campagne est comme endormi, les rizières sont dénudées, en attente du printemps qui arrivera ici en fait bien plus tard. Tout est calme, bien plus silencieux qu’à Shenzhen. Un monsieur nous emmène derrière sa maison, il y a des cochons.
Tout est bon dans le cochon. Le cochon semble un animal symbolique important depuis l’origine de la civilisation chinoise. Dans les temps anciens, suite à sa domestication, il était une source de nourriture mais aussi un symbole de richesse. Dans l’astrologie chinoise, c’est un animal frivole et généreux, il symbolise la prospérité. En cette période, le cochon est donc décliné à toutes les sauces. Nous avons mangé de beaux morceaux mais aussi des abats, j’ai pu goûter à un plat confectionné à partir de la peau du cochon, un autre avec des pieds de cochon. En imitant une patte de cochon qui gratte vers elle avec sa main, little miss tiny me dit que manger le pied du cochon, ça rapporte de l’argent pour toute l’année.
Cet article est maintenant terminé, mais ne faites pas votre tête de cochon, il y aura un nouvel article prochainement. A bientôt. 

Commentaires

bernadette a dit…
quand vous viendrez à Pont Evéque nous ferons une partie de mahjong Bonne année