En passant par Cracovie. Pologne (1)

Malgré le fait que je raconte une partie de ma vie sur ce blog, je suis quelqu’un d’assez discret et je n’aime pas être sur le devant de la scène. Je peux toutefois vous confier que le mois dernier, je suis passé en France, pour assister à une série de conférence à l’Institut Pasteur, puis pour assister à un mariage. Mais le sujet n’est point là, parce qu’entre ces deux évènements, j’ai eu l’occasion de passer une semaine en Pologne. Cela m’amène donc à vous faire découvrir la ville de Cracovie et un petit voyage dans le temps. Et je vais vous raconter des histoires.
Tout d’abord, Cracovie est une des villes les plus anciennes de Pologne et j’aime beaucoup l’architecture médiévale et renaissance, et ressentir la présence de l’histoire autour de moi. Cracovie était, avant Varsovie, la capitale de la Pologne, et reste la capitale du cœur pour les Polonais. C’est en effet une belle ville romantique, et malgré le temps maussade, j’y ai passé un agréable moment.
Au centre de la vieille ville, il y a la place du marché, le Rynek Główny, c’est une des plus grandes places médiévales en Europe. Au centre, il y a la Halle aux Draps, un édifice tout en longueur, dont la construction a débuté en 1257, mais plusieurs fois remaniée depuis cette époque. Au moyen âge, le bâtiment permettait la vente en gros de tissus. A côté, il y a une grande tour gothique, c’est le beffroi de l’hôte de ville, il date du XIVe siècle, mais c’est tout ce qu’il reste de l’ancien hôtel de ville qui a été détruit en 1820 pour faire de la place ! J’ai osé pénétrer dans la tour, il y a de belles salles voutées, puis j’ai grimpé des marches en pierre, qui deviennent étroite et raide sur la fin, pour accéder au niveau du mécanisme de l’horloge. De là haut, il y a une belle vue sur la place, la halle aux draps et la basilique Sainte-Marie, Kościół Mariacki w Krakowie, en polonais.
Rynek Glowny : Halle aux draps et beffroi de l'hôtel de ville
Basilique Sainte Marie, vue du beffroi de l'hôtel de ville
intérieur de la Basilique
C’est une belle église construite en brique, elle date pour la partie principale du XIVe siècle. Vous pouvez remarquer que les deux tours ont une taille différente. D’après la légende, la construction de la basilique fut confiée à deux frères, chacun devant construire une tour. Mais les deux frères étaient des rivaux, au lieu de coopérer, chacun voulait ériger la tour la plus haute et la plus belle. L’un des frères finit par assassiner son frangin, arrêtant ainsi la construction de la tour. L’assassin exécuté, la municipalité terminera la construction des tours dans leur hauteur actuelle.
C’est dans la petite tour que se trouve la cloche de l’église. Tandis que la plus haute des tours fait office de tour de guet. D’après une légende, lors de l’invasion de la Pologne par les Mogols en 1241, une sentinelle perchée sur une tour d’une église a sonné l’alarme en jouant du clairon, mais celui-ci a été tué par une flèche tatare. Aujourd’hui, et cela toutes les heures, un trompettiste joue le Hejnał, une mélodie courte et s’arrête subitement, comme s’il était mort. La véritable origine du Hejnał est inconnue, la première mention historique de la mélodie date de 1392, mais il semble que la légende du gardien prévenant l’arrivé des Mogols a été inventé au début du XXe siècle.
Il y a moult églises à Cracovie, j’en ai visité pléthore, de différents styles architecturales et de différentes époques. Ils sont assez religieux dans cette ville, il faut dire qu’un pape célèbre est originaire de par ici, depuis, il a été élevé au rang des divinités locales.
J’ai beaucoup aimé l’atmosphère de la vieille ville, les rues pavées et piétonnes, les restaurants et les bars.
Avec mon salaire chinois, j'ai aimé la Pologne qui est aussi un bel avantage pour les voyageurs a petit budget. A l'auberge de jeunesse, je peux avoir un lit pour 5 euros pour la nuit. Une originalité de la Pologne, c'est ce qu'on appelle les bars à lait. C'est un souvenir de l'époque communiste mais qui reste aujourd'hui une institution en Pologne qui n'a pas d'équivalent dans d'autres pays. Ces établissements sont en fait à mi chemin entre le restaurant et la cantine, on peut y manger de la cuisine polonaise simple, pour un prix attractif. Il y a souvent du choux ! Mais par exemple, pour 5 euros, je peux avoir une bière, une soupe et des pierogi. C'est drôle, c'est un plat typique de la cuisine polonaise, des genres de raviolis, qui ressemble étonnamment aux jiazi, les raviolis chinois, mais qui ont bien sûr un goût différent en raison de la nature de leur fourrage !
En suivant la voie royale, j’arrive au pied de la colline du Wawel, au bord de la Vistule, le fleuve qui traverse Cracovie. Autrefois, vivait ici un terrible dragon. Régulièrement, il tuait les habitants des alentours, pillait leur maison et dévorait le bétail. C’est le roi Krakus qui voulait se débarrasser du dragon et pour ce faire, il demanda de l’aide auprès des plus valeureux chevaliers de son royaume. Malheureusement pour eux, le maudit dragon était un cracheur de feu, et tous les preux chevaliers périrent. En désespoir de cause, le roi a promis la main de sa belle demoiselle en mariage à qui pourrait vaincre le dragon. Néanmoins, malgré la récompense alléchante, aucun des courageux guerriers ne parvint à vaincre le dragon. C’est finalement un apprenti cordonnier qui tenta sa chance grâce à l’astuce. C’est en effet un piège qu’il tendit au dragon, en fourrant un agneau de soufre, il confectionna un appât, et le mit à l’extérieur de la grotte du dragon. Par l’odeur alléchée, le dragon dévora l’animal. Mais le soufre, ça fait mal à l’estomac, et ça donne soif. Le dragon se dirigea vers la Vistule, et but, but sans cesse, tellement le soufre l’avait assoiffé. Il but tellement que son ventre gonfla et finit par éclater. Le petit cordonnier épousa la fille du roi comme promis et ils vécurent heureux et eurent beaucoup d’enfants.
le château et la cathédrale du Wawel
Aujourd’hui, sur la colline du Wawel, il y a un château. Edifié à l’origine au XIe siècle, il sera par la suite remanié. Casimir III le Grand le transforme en une puissante forteresse gothique qui va néanmoins brûlé en 1499. Des architectes italiens vont bâtir la résidence royale que l’on peut visiter aujourd’hui. Les appartements royaux sont richement décorés avec des meubles d’époque et de nombreuses tapisseries de la Renaissance. Pour l’anecdote, pendant la seconde guerre mondiale, ces tapisseries ont voyagées au Canada ! De même, les appartements d’état sont magnifiques. C’est dans la salle des députés que se réunissait le parlement polonais et qu’avait lieu des audiences royales. Je lève la tête et 30 têtes sculptées jaillissent du plafond et me regardent. L’une de ces têtes est bâillonnée. D’après la légende, un roi rendit ici un jugement totalement injuste et tenta le lendemain de réparer son erreur. Il convoqua ensuite un sculpteur et lui ordonna de rajouter un bâillon sur la bouche de la figure qui avait osé parler la veille dans cette salle.
Dans l’enceinte du château, la cathédrale du Wawel a été érigée au début du XIVe siècle sur l’emplacement d’une église romane plus ancienne. A l’entrée de la cathédrale, de gros os antédiluviens, qui sont censés être ceux du dragon ont le pouvoir d’écarter les forces maléfiques et de protéger la cathédrale. La cathédrale était le lieu de couronnement des rois de Pologne, elle est toujours aujourd’hui un sanctuaire national, où des rois, des reines, des poètes et des héros nationaux de la Pologne sont enterrés.
Sous le règne de Casimir le Grand, entre 1333 et 1370, Cracovie connaît un grand épanouissement, de la même manière que Prague. C’est à cette époque qu’un grand nombre de Juifs, alors persécutés en Europe occidentale, vont émigrer en Pologne. Puis, Cracovie connaît une apogée à la Renaissance. Située au carrefour de plusieurs routes commerciales, au XVIe siècle, Cracovie devient un centre scientifique et artistique prestigieux en Europe. Mais c’est en 1609 qu’un roi transfère la capitale à Varsovie. Dévastée par les Suédois en 1655, annexée par les Autrichiens en 1794, puis autonome de 1815 à 1846, la ville redevient autrichienne jusqu’en 1918. Pendant la seconde guerre mondiale, elle est marquée par l’extermination des juifs du quartier de Kazimierz.
A 70 km de Cracovie, il y a Auschwitz. Au début, je ne voulais pas y aller, comme si j’avais peur d’être confronté à l’horreur. Mais j'y suis allé en train. Je ne pense pas que la visite apporte quelque chose de plus que les livres d’histoire, les photos et les films de cette époque. Un lieu de mémoire. « Arbeit macht frei », « Le Travail rend libre » dit la pancarte à l’entré du camp. Celui qui ne se souvient pas de son passé et condamner à le revivre disait l’autre. En Pologne, au Rwanda, au Cambodge et ailleurs : Pourquoi, comment, dans certaines conditions, l'Homme devient un bourreau ?

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