Albi et la Cathédrale Sainte Cécile au bord du Tarn |
Aujourd’hui je veux partager avec vous un dernier article concernant ma dernière visite en France, avant de vous narrer mes nouvelles aventures en Chine.
Ce voyage en Europe m’a fait plaisir, notamment pour revoir ma famille et mes amis même si des ami(e)s en Chine m’ont aussi beaucoup manqués et j’aurais tellement aimé partagé ce voyage avec eux. Retourner dans son pays après une longue absence permet aussi d’avoir un regard nouveau sur les paysages et la culture. Je traverse le temps en me transformant. Ainsi, je ne suis ni tout à fait le même qu’il y a un an, ni tout à fait un autre. C’est dans cet esprit que j’apprécie la beauté de l’architecture, les vieilles pierres et la sensation de l’histoire, des villes plus petites et l’accessibilité de la campagne plus facile.
Pendant ce voyage en Europe, je suis passé par le sud ouest de la France, c’est une région que je ne connais pas tellement dans le fond. Ce n’est pas les Alpes ou l’Auvergne, ni même la Bretagne, des régions qui me sont plus familières. Entre autre, j’ai fait une expédition à Albi. Mon regard était particulièrement neuf et vierge car je n’étais encore jamais allé dans cette ville.
L'autre rive de Albi, depuis la berge avec la Cathédrale |
Voici donc quelques photos, impressions et découvertes historiques de cette expédition à Albi. J’ai pris le train depuis Toulouse, je prends souvent le train, et j’ai déambulé dans la ville par cette belle et agréable journée de printemps.
Albi est une petite ville et j’ai beaucoup aimé flâner dans les rues pavées. Comme à Toulouse, la brique est omniprésente. Suivant l’heure de la journée, suivant la lumière, toute une palette de couleur colore la ville, du rouge, à l’orange, au rose. J’ai aimé flâner au bord du Tarn, rester un moment à l’ombre des arbres aux feuilles naissantes, profiter du panorama, différent le long des deux berges.
La vieille ville médiévale est bien préservée, le Pont-vieux, bâti en 1040, est le plus vieux pont de France. Il a enrichi la ville par son péage, en faisant d’elle un carrefour commercial. Une maison, dite la maison romane, date du XIIe siècle. Par ailleurs, une caractéristique des logis albigeois est la présence d’un grenier couvert ou soleilhier.
Albi, c'est tellement vieux que mes photos sont en noir et blanc |
Mais la majesté de la ville, c’est la cité épiscopale avec l’imposante cathédrale Sainte Cécile. D’ailleurs, depuis 2010, la cité épiscopale est inscrite sur la liste du patrimoine mondial de l’Unesco.
Je viens maintenant introduire quelques notions d’histoire de la région, notamment de la période médiévale.
Aux XIIe et XIIIe siècle, Albi est un centre du mouvement religieux cathare, les Albigeois. C’est dans le contexte de la civilisation occitane qu’apparaît cette nouvelle croyance, issue du christianisme, mais très critique vis-à-vis du catholicisme. Plus libres, les villes du Midi sont aussi les plus accueillantes aux idées étrangères. Les cathares refusent les rites du clergé catholique, tels que le culte des reliques et même de la croix, et inventent de nouvelles pratiques. Pour eux, dieu est le principe bon, mais il est absent du monde. Il existe aussi un principe mauvais, dans le monde physique. Le monde n'a pas été crée par dieu, mais par le mal. Un genre de dualisme originel. Ainsi, les Cathares haïssent le monde. Les cathares se doivent d’atteindre la pureté parfaite de l’âme. Ils croient à la réincarnation et certaines pratiques leur permettent de libérer leur âme qui pourra enfin regagner le ciel. Pour mériter leur salut, ils mènent une vie austère.
Deux hypothèses se sont affrontés sur l’origine du catharisme : pour certains, il y aurait eu une influence orientale, il y aurait des liens possibles avec les Balkans. Pour d’autres historiens, le catharisme serait né sur place et se serait appuyé sur des faits moraux et sociaux (une forme de soulèvement social contre un ordre étouffant que l’église incarnait). Mais pour les catholiques, le catharisme était une hérésie et il fit, à partir de 1209, sous Philippe Auguste et l’ordre du pape Innocent III, l’objet de la première croisade en pays chrétien (prise de Béziers et de Carcassonne). Après une seconde croisade en 1228, sous Louis VIII, les cathares ont fait l’objet de l’inquisition à partir de 1233. Les derniers cathares vont se réfugier dans des châteaux dans les Pyrénées, puis vont disparaître avec la prise du château de Montségur en 1244.
Lors de la croisade, Albi passe dans le camp catholique sans résistance. Mais la construction du palais épiscopal fortifié de la Berbie et de la cathédrale Sainte-Cécile, à partir de 1277, symbolise le triomphe de l’église catholique et a pour but d’empêcher d’autres hérésies futures. Toutefois, par son austérité, l’architecture de la cathédrale répond aux exigences des cathares.
Le contraste entre l’extérieur austère et sobre de la cathédrale-forteresse et la richesse et l’opulence des décors intérieurs m’ont beaucoup surpris. En fait, le décor intérieur a été mis en place à la fin du XVe siècle, soit bien longtemps après l’hérésie. Un décor grandiose dans une enveloppe austère. Les sculptures, les peintures, les voûtes reflètent la renaissance et ont été exécutés par des artistes italiens. Le plafond invite « à contempler Dieu dans l’éclat de sa puissance triomphale » !
La peinture du Jugement dernier, réalisée en 1495, surprend par son gigantisme. Elle représente l’univers de la désespérance, le royaume des démons hideux, le jardin des supplices. C’est drôle, car dans certains temples en Asie, il y a le même type de représentation, signe d’angoisse ou d’avertissement. Si vous ne voulez pas subir tous ces tourments, ayez de bons points en ne commettant pas trop de péché !
Les autres peintures décoratives, la nef, le jubé, le chœur, les statues des divinités, l’ensemble est magnifique.
À côté de la cathédrale, c’est le palais de la Berbie. À la fin de la croisade contre les Albigeois, il représente le pouvoir de l’évêque. Depuis 1905, il abrite le musée d’Albi, qui devient, après 1922, le musée Toulouse Lautrec, abritant de nombreuses œuvres de l’artiste. Je conclurai par ses mots : « Les crayons c'est pas du bois et de la mine, c'est de la pensée par les phalanges ».
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