Les particules n’ont pas l’air fines

Je suis allé à Beijing pour le nouvel an, pas le chinois, mais celui du calendrier solaire, qui tombe pile le même jour chaque année, le premier janvier. En plus cette année, ça tombait au beau milieu d’un weekend, je suis donc allé voir des amis que je n’avais pas vus depuis longtemps.
Pile au bon moment, Beijing nous a envoyé une alerte rouge à la pollution atmosphérique, un brouillard toxique, un air irrespirable, un amas grisâtre, bref, de quoi placer l’année sous les meilleurs auspices.
Ce jour là, les particules fines atteignaient une concentration de 500 µg/m3, soit bien au-delà de la concentration maximale de particules fines que conseille l’OMS qui est de 25 µg/m3.
Mais d’où viennent ces particules ? Elles peuvent être d’origine naturelle (argiles, limons, sables, sels), volcanique, organique (graines, pollens, fibres végétales, bactéries et champignons) ou de nature anthropique, c'est la pollution : combustion industrielle, chauffage, incinérateur, transport routier, construction.
Comme vous le savez, la Chine s’est développé à un rythme effréné ces dernières années et si cela a permis une certaine prospérité et une amélioration de la qualité de vie des chinois, c’est souvent au détriment de la qualité de l’environnement. La Chine est aujourdui la deuxième, ou la première économie de la planète. C’est aussi le premier marché automobile mondial et il est très disputé par les constructeurs étrangers. C’est par exemple le cas du groupe français PSA qui s’est associé à l’entreprise chinoise Dongfeng en 2014. Le marché est en effet énorme : à titre d’exemple, en France, il y a environ 600 voitures pour 1000 habitants, selon les statistiques. En Chine, c’est environ 60 voitures pour 1000 habitants. Néanmoins, les chinois étant nombreux, c’est déjà la catastrophe, toutes les villes sont saturées par des embouteillages monstrueux.
La voiture, en plus de la pollution atmosphérique, et l’une des responsables de l’émission de CO2 et du changement climatique global, c’est une atteinte aux paysages, une pollution sonore, un gouffre financier et une arme en puissance de part les accidents de la route. C’est un bel outil, mais il date du siècle dernier, il serait peut-être temps de passer à autre chose.
Depuis quelques mois, on voit apparaître des vélos partagés partout dans les rues des grandes villes chinoises. Une révolution? J’en reparlerai dans un prochain article. La Chine a également réalisé des investissements colossaux dans le train.
Smog toxique à Beijing
Mais ces pics de pollutions atmosphériques en Chine proviennent en grande partie de la combustion du charbon utilisé pour le chauffage et la production d'électricité, dont la demande augmente durant l'hiver. S’il n’y a pas de pluie, pas de vent, le nuage de pollution s’accumule sur Beijing et les autres grandes villes donnant à l’air une odeur désagréable.
La pollution est un sujet de mécontentement en Chine, et l’un des seuls thèmes ayant entraîné des manifestations dans la rue ces dernières années, dans un pays ou cela est interdit. Ainsi, pour conserver sa mainmise sur le pays, le Parti communiste a entrepris des réformes, mis en place des lois de protection de l’environnement mais qui ont encore bien peu d’effets. Avec l’accord de Paris sur le climat en 2016, la Chine s’est engagée à limiter ses émissions de gaz à effet de serre, elle va arrêter la construction de nouvelles centrales thermiques au charbon et souhaite augmenter la part des énergies non fossiles.
Mais il y a aussi des intérêts économiques, avec la production industrielle. Pas facile de fermer une usine polluante si elle rapporte de l’argent et des emplois à la population. "Il est glorieux de s'enrichir" disait Deng Xiaoping losqu’il réforma la Chine.
Aussi, afin de continuer à consommer des produits peu chers, faire du profit et de tenir les objectifs de CO2, les pays occidentaux préfèrent délocaliser les usines en Chine. Autant polluer ailleurs et profiter tout de même des objets manufacturés importés. Toutefois, les problèmes environnementaux à venir pourraient bien nuire au développement économique de toute la planète.
Galerie d'art... avec nos masques
Bonne année !!
Mais lors de cette excursion à Beijing, nous n’avons pas fait que porter des masques toute la journée. Nous avons beaucoup mangé ! D’ailleurs certains disent que manger est la « religion nationale » de la Chine. « La nourriture est le paradis du peuple » dit un proverbe de la Chine ancienne. Pour Confucius et sa société idéale, il était important que chacun ait de quoi manger. Il y a une espèce de philosophie culinaire, un symbolisme lié à ce que l’on mange. La médecine traditionnelle chinoise s’en mêle aussi, il y a des équilibres à respecter, des aliments qui vont bien ensembles, le chaud et le froid, le sec et le mouillé. Bref, ce que l’on mange est le premier remède contre les maladies. « Que l’aliment soit ton premier médicament! » disait Hippocrate en son temps.
Bon, la pollution d’un côté, la nourriture de l’autre, je ne sais pas si ça se compense.
Une forme de contestation politique ?
Pour digérer, nous sommes allés au district 798. Qu’est-ce que c’est-y donc ? Le sais-tu ? C’est un ancien quartier industriel de Pékin, des usines désaffectées qui ont été transformées en galerie d’art. Les usines datent des années 1950 (798 était le nom d’une des usines). Certains murs sont encore recouverts de slogans révolutionnaires de l’époque. Des artistes ont commencé à s’installer ici, d’abord de façon temporaire, à la fin des années 1990, le site devient le refuge de l’Académie des Beaux-Arts de Pékin. Mais depuis 2004, le site d’exposition est définitif et il devient un endroit symbolique de la culture pékinoise. Des expositions internationales y ont lieu, des restaurants et des bars ont ouverts, attirant les jeunes, les bobos, les artistes, les designers, la communauté avant-gardiste ou simplement des curieux. La plupart des galeries sont accessibles gratuitement.
Une ancienne usine transformée en salle d'exposition
Une peinture de Cao Yong à la gloire de Xi Jiping : propagande ?
Aujourd’hui il fait beau, il y a un beau ciel bleu à Shanghai et c’est bientôt le nouvel an, de nouveau, je veux dire celui qui est important ici, celui du calendrier lunaire, celui qui doit être accompagné de signes de bon augure.
A bientôt donc, pour de nouvelles aventures.

Commentaires