la vieille ville de Luoyang |
Voilà longtemps que je n’ai pas rédigé de nouvel article, et certains commencent à chercher à me tirer les vers du nez pour connaître la suite. Je termine mon voyage au Henan à Luoyang (洛阳). Vieille de 3000 ans, Luoyang a été à plusieurs reprises capitale de la Chine ancienne : sous les Zhou orientaux, les Han orientaux, le royaume de Wei, les Jin occidentaux et les Wei du Nord, puis sous les Sui (581-618) et les Tang (618-907).
Je pose mon sac à l’auberge de jeunesse, je met le nez dehors et vais explorer les environs. Il y a une grosse rivière, c’est le Huang He. Cela ne vous dit rien, c’est le fleuve jaune. Puis il y a des immeubles immenses, beaucoup en construction, du béton laid, des routes à six voies. Souvent, les villes chinoises ne sont pas très jolies. Mais je me rends au centre ville, là, il reste de l’architecture ancienne, des remparts historiques, une longue rue, avec des boutiques artisanales et des restaurants, où je peux me balader le nez au vent. Soudain, je tombe nez à nez avec la tour du tambour. A vue de nez, elle date du XVIe siècle.
Les zonards de Luoyang ! |
Je vais maintenant vous raconter une histoire. Il était une fois, un soir d’hiver, sous la dynastie Tang, une fameuse impératrice, Wu Zetian, qui habitait dans l’actuelle Xi an, donna l’ordre aux fleurs de son jardin de fleurir pour le lendemain. Elle souhaitait les mener par le bout du nez. Mais ses satanées pivoines ont refusé de fleurir ! Obstinées, elles continuaient nonchalamment de dormir. Malheur pour elles, ça leur pendait aux nez et ce qui devait arriver arriva : les pivoines furent bannies de la ville et se refugièrent, la queue entre les pétales, à Luoyang. Toutefois, les pivoines adoptèrent avec entrain leur nouvelle ville et eurent beaucoup d’enfants. Depuis cette époque, les pivoines se pâment, elles se pavanent dans Luoyang. Elles sont devenues l’emblème de la ville.
Dans les rues de la ville, il y a des peintres qui peignent, devinez quoi, des pivoines. D’ailleurs, ils sont assez doués et font ça les doigts dans le nez.
J’ai encore envie de regarder plus loin que le bout de mon nez, et je vais voir le temple du cheval blanc. Il serait le premier sanctuaire bouddhique construit en Chine, lorsque cette religion pénétra en Chine vers l’an 68, sous les Han. Il a bien sûr depuis été reconstruit plusieurs fois sous les Ming, les Qing, puis après la révolution culturelle. Sur le site, il y a d’autres temples tout neuf, l’un dans le style indien, et si vous avez le nez fin, vous pouvez reconnaître l’autre dans le style birman, encore en cours de construction.
À quelques kilomètres de Luoyang, les grottes de Longmen 龍門石窟 (lóngmén shíkū) furent creusées du Ve au VIIe siècle sur une falaise, au bord de la rivière Yishui. Il y aurait plus de 100 000 statues et peintures. La plus grande mesure 17 mètres et la plus petite moins de 2 cm. Mais au début du XXe siècle, de nombreuses sculptures ont été volées ou décapitées au nez et à la barbe des chinois, et l’on peut les admirer aujourd’hui dans les musées occidentaux….
Grottes de Longmen |
Le visage du grand bouddha (sculpté en 676) serait celui de l’impératrice Wu Zetian. Mais malgré son sale caractère, l’expression du visage du bouddha se montre compatissant.
C’est rigolo tous ces bouddhas que j’ai rencontré en Asie, tous semblables et tous différents, des maigres, des gros et des petits, des assis, des couchés, des dans la niche. Ce n’était pas toujours ainsi. À l’origine du bouddhisme, le bouddha n’est représenté que par des symboles comme la roue du dharma ou l’empreinte de ses pieds. Ce qui est vraiment rigolo, c’est que les sculptures du bouddha les plus anciennes connues ont un style hellénique. Des bouddhas au nez d’Apollon, le corps drapé d'une toge. Ce sont des descendants grecs d’une colonie amenée par Alexandre le Grand qui seraient les premiers à représenter le bouddha dans une région correspondant aux actuels Pakistan et Afghanistan. Ces grecs, il faut toujours qu’ils fourrent leur nez quel que part !
Moi je commence à piquer du nez. Bonne nuit et à la prochaine.
"Mais si là regarde, ça se voit comme le nez au milieu de la figure" |
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