Le jour où j’ai été initié au yuan fen à Jimingyi

Je vous emmène aujourd’hui dans la campagne du Hébei, à 140 km au Nord-Ouest de Pékin, dans le village de Jimingyi (鸡鸣驿城). Pour rejoindre le village, je crois qu’il fallait prendre un bus puis changer de bus à un endroit. Mais je pense que j’ai raté cette étape ou je n’ai pas compris où aller. Il est encore courant en Chine que je ne comprenne rien de ce qui se passe, j’ai un peu l’impression d’être illettré et idiot de naissance, même si cela peut amener des situations rigolotes. En tout cas quand j’ai demandé de l’aide pour savoir ou descendre, en montrant le nom de la ville où je voulais aller, j’ai bien vu que quelque chose n’allait pas. Finalement, le bus me dépose au bord d’une autoroute, au milieu de nulle part… Puis j’ai entrepris une marche à pied, quelqu’un m’a orienté dans une direction avant que quelqu’un d’autre m’indique une direction opposée un peu plus tard. Je poursuis ma marche. Finalement, une voiture s’arrête spontanément et me propose de m’emmener. J’étais un peu hésitant au début, mais le type était honnête, il me dépose au pied des remparts de Jimingyi.
Jimingyi et sa montagne dans le lointain
 La particularité du village de Jimingyi, c’est qu’il est en effet entièrement fortifié, cela lui donne une fière allure ! L’origine du village remonte au XIIIe siècle, à l’époque de la dynastie des Yuan, c’était un relais de poste, reliant Pékin à la Mongolie. Les messagers pouvaient par exemple changer de chevaux et s’arrêter pour la nuit. L’architecture que l’on rencontre aujourd’hui est toutefois plus récente et provient des dynasties Ming et Qing. De nombreux temples datant de cette époque, parfois en ruines, parfois restaurés, sont disséminés dans le village. Ces temples sont caractéristiques de la religion populaire ou traditionnelle de Chine, avec un mélange de personnalités bouddhiste, taôiste et confucéenne.
Temple restauré à Jimingyi
Il va pleuvoir...
Pour passer la nuit dans le village, il faut demander aux villageois aux alentours. Pour 50 yuans, soit 6 euros, il est possible de passer la nuit avec le repas du soir et le petit déjeuner compris. Cela leur permet de mettre du beurre dans les épinards. D'ailleurs, la maison est entourée d'un mur, à l'intérieur, il y a un potager qui plairait sûrement à mon papa. Le soir, mon hôte me propose un verre d’alcool, c’est transparent comme la vodka, mais je soupçonne que c’est de l’alcool de riz. C’est particulièrement fort, et j’ai refusé poliment la deuxième offre.
J’ai rencontré une bande de jeune sur les remparts. En échangeant un peu d’anglais, je me suis fait de nouveaux amis, ils sont étudiants et passent également la fin de semaine dans la région. Ils ont tenté de m’apprendre beaucoup de mots en chinois que j’ai oublié pour la plupart. L’un d’entre eux m’a introduit au yuán fèn 緣份, qui peut se traduire par destin, affinité predestinée, un principe de rencontre. C’est un truc un peu philosophique ou spirituel chinois, pour ce que j’en ai compris, quelque chose dans le déterminisme. Cependant, moi je suis plutôt un adepte de l’indéterminé, du hasard total ou de la contingence. Mais ces réflexions métaphysiques ne nous ont pas empêché de visiter le village ensemble. Nous rencontrons un petit vieux, je crois que c’est le doyen du village, je n’ai pas bien compris. Il arbore quelques médailles et pensait que j’étais américain. Lorsque je lui ai révélé que j'étais français (l'un de mes compagnons de route faisant office de traducteur), il n'avait pas l'air trop déçu, et il m’a demandé une photo avec lui malgré tout.
Le lendemain matin, nous nous levons de bonne heure pour grimper une montagne dont j’ignore le nom, mais c’est celle qui est proche de Jimingyi.


Mais le problème, c’est que la randonnée, ce n’est pas tellement dans la culture chinoise. Alors il n’y a pas de chemin pour monter là-haut ! Plusieurs fois, il nous a fallut rebrousser chemin car notre premier choix était inaccessible ou trop dangereux. Nous nous frayons un chemin dans l’herbe haute, puis dans les rochers, j’étais un peu pessimiste car je pensais qu’atteindre le sommet était une chose inenvisageable. Finalement, après moultes péripéties, nous arrivons à un espèce de vieux muret faits de pierres entassées, preuve incontestable d’une présence humaine. En fait, il y avait bien un chemin qui monte sur cette montagne, mais au niveau de l’autre versant. Et ce chemin mène à un temple.
Nous rencontrons des moines ou des maîtres, habillés de façon différente, appartenant peut être à différence tendance. Les moines nous ont offert à manger gratuitement, et nous avons apprécié la pitance même si ce n’était pas très bon dans le fond. L’un d’entre eux me dit qu’il n’avait jamais vu d’étranger par ici, mais il avait l’air content. Il m’offre un chapelet bouddhique. Je suis un peu gêné car je ne savais pas quoi en faire, mais j’ai accepté car ça avait l’air important.
Une petite ville industrielle vue de la montagne
Nous redescendons de la montagne en fin d’après midi afin de rejoindre un autre village en contrebas. Puis je prends un bus qui m’emmène dans une autre ville, Shacheng, avec l’un de mes compagnons de route. Je n'ai aucune idée concernant le devenir des trois autres protagonistes ! Nous allons nous renseigner à la gare, mais le prochain train pour Beijing est à 3 heures du matin ! Nous avons le temps de manger un bout, c’est particulièrement épicé, car il faut bien avouer que cela ressemble à une soupe de piment n’est ce pas ?
Voilà, c'est fini ! Nous passons une partie de la nuit à la gare et après 3 heures de train, nous voilà à Pékin, frais et dispo pour retourner au labo !! A bientôt !

Commentaires

veroniqur a dit…
Passionnant et de quoi preparer son voyage au Henan.
Les photos sont magnifiques!