Guizhou (1) L'arrivée

Aujourd’hui, je vous emmène dans le Guizhou, une province intérieure au sud de la Chine avec son climat pluvieux et son relief un peu montagneux. Un voyage à travers les contrastes de la chine.
Nous sommes une semaine d’octobre, la semaine d’or, la période de la fête nationale chinoise où beaucoup profitent de quelques jours de vacances. C’est une période de  cohue où les trains sont bondés. D’ailleurs, nous allons prendre le train.

Un train pas comme les autres

Nous prenons d’abord le métro pour nous rendre à la gare du Nord de Shenzhen. Des caméras à imagerie thermique lisent notre température. En temps de covid, les fiévreux ne sont pas admis. Nous passons ensuite sous un portique équipé d’un système de reconnaissance faciale qui vérifie probablement notre honnêteté. Un projet pour le futur devrait d'ailleurs utiliser la reconnaissance faciale pour payer le trajet sans même à avoir sortir sa carte de transport ou son téléphone portable.
Puis, nous devons passer notre sac-à-dos dans un système de détection des métaux, un peu comme à l’aéroport. J’ai mon gros sac de randonnée sur le dos, comme il est lourd, je dois faire des gesticulations pour le renverser sur le tapis roulant qui va le glisser dans le système. A la sortie de la machine, le verdict est clair : je ne possède pas d’armes contondantes ou tranchantes mais le système a détecté dans mon sac une gourde remplie d’eau. Je dois la présenter à un agent qui va l’analyser grâce à une machine qui détecte les explosifs.
Après tout ce protocole, nous pouvons enfin accéder au quai. Une fois dans le métro, Little Miss Tiny scan un QR code avec son téléphone. Au cas où un cas covid passerait par là, elle serait automatiquement alertée.
Une fois arrivé à la gare du nord, nous devons passer une nouvelle fois des portiques de sécurité puis il faut montrer patte blanche. Dans le contexte de la pandémie, nous devons montrer une application de tracking sur notre téléphone qui mêle géolocalisation, données personnelles et santé publique sans se soucier vraiment de notre vie privée. Le code vert nous permet d’entrer dans la gare et de poursuivre notre voyage. Mais pour accéder aux quais, il nous faut encore passer par un portillon que peut franchir Little Miss Tiny grâce à sa carte d’identité. Pour moi, avec ma tête d’étranger, je dois montrer mon passeport à un agent à proximité pour avoir l’autorisation de passer la porte.
Enfin nous prenons un train pas comme les autres, blanc au look futuriste, le tgv chinois, qui nous mènera jusqu’à Guiyang en 5h30. Guiyang (贵阳) est la capitale du Guizhou, localisée au centre de la province.

Le Guizhou, c'est où?

Le Guizhou est une province relativement pauvre et moins développé en comparaison d’autres provinces chinoises. Toutefois, la croissance augmente rapidement, surtout à Guiyang. Le Guizhou offre au voyageur quelques merveilles naturelles comme des collines et des vallées verdoyantes, des grottes et des formations calcaires. Les habitants du Guizhou sont aussi diversifié que son environnement. En effet, 37% de la population appartient à des minorités ethniques tels que les Dong, les Miao, les Yi et d’autres groupes. Les habitants du Guizhou parlent une variante du mandarin mais les minorités possèdent également leur propre langage.
Le Guizhou
Nous ne connaitrons que peu de choses de Guiyang. Nous arrivons le soir et nous avions réservé un hôtel proche de la gare. Nous nous délectons d’un barbecue situé dans une rue piétonne, proche de notre hôtel et nous prenons un train le lendemain matin en direction de Kaili, à 200 km de Guiyang.
 L'arrivée à Guiyang
Nous voilà maintenant à Kaili. La gare de train à grande vitesse est éloignée du centre ville, nous prenons donc un bus qui va nous transporter jusqu’à la gare de bus centrale, de là, nous pourrons explorer les environs. La pluie fine qui nous accompagne pendant le trajet amplifie encore la grisaille de la ville. Mais je vois plusieurs grands-mères qui affrontent le mauvais temps équipé d’un sac plastique sur la tête, elles brisent la monotonie et je trouve cela rigolo. A Shenzhen, tout le monde utilise un parapluie, pour se protéger de la pluie comme pour le soleil. Ici, ces grands-mères originales me donnent déjà le sentiment d’être ailleurs. Le voyage débute.
Kaili est une ville industrielle. Une centrale électrique thermique à charbon, située à l’extrémité de la ville, participe à la bigarrure de la composition de l’air des environs. Comme partout en Chine, de nombreux immeubles en béton en cours de construction s’élèvent tels des monstres arrogants vers le ciel. En sortant du bus, je respire a pleins poumons des composés variées de souffre, d'oxyde d'azote, de monoxyde de carbone, de chlore, de suie et de mélange composite d'acides, pendant que ma femme s’inquiète pour trouver à manger.
Le village de Langde-le-haut 上朗德
Nous nous renseignons sur les horaires de bus pour explorer la région, puis nous trouvons un snack en face de la station de bus où nous commandons des crêpes chinoises et des nouilles. Tout en mangeant, nous discutons de la suite de notre périple.
Autour de Kaili, la région abrite de nombreux villages de minorités, nichés dans des vallées ou au bord de rivière. Ici, il y a beaucoup de Miao, mais aussi des Dong, qui font partie des 56 minorités reconnues en Chine. Les Miao représentent 12 % de la population de la province du Guizhou, mais beaucoup plus par ici.

Le village

Après 1h30 de trajet dans un minibus sur une route de montagne cabossée, nous arrivons à Xia Langde 下朗德. Avant d’entrer dans le village, nous devons montrer l’application covid de notre téléphone. Nous avons le code vert, nous sommes donc libre de déambuler comme nous voulons. Nous montons à pied en direction de Shang Langde 上朗德, à quelques kilomètres de là. Je porte mon gros sac-à-dos, celui-là même qui m’a accompagné en Inde, au Népal, en Birmanie et ailleurs. Cela impressionne toujours ma femme qui est grosso modo du même gabarit que mon sac-à-dos. Elle s’inquiète toujours si j’arrive à marcher avec. Toutefois, elle porte également un sac à sa hauteur. D’ailleurs celui-ci est chargé de bouffe car tout comme les hobbits, ma femme consomme plusieurs repas par jours.
Nous marchons au bord d’une rivière dans un cadre verdoyant, et nous voyons le village qui se dévoile petit-à-petit au fil de nos pas. Le paysage est pittoresque et rafraîchissant. Le village est au bord de la rivière, entouré de montagnes vallonnées. A proximité des rizières, un pont couvert, le pont du vent et de la pluie, permet de traverser la rivière.
Le chemin nous mène à un escalier qui nous emmène à l’intérieur du village en passant sous une porte en bois. Les ruelles du village sont couvertes de pavés en pierre. Les maisons sont en bois, certaines montées sur pilotis. L’ensemble révèle un peu une ambiance chalets de montagne, bien que je n’ai pas humé d’odeur de raclette à proximité.
L'arrivée à Langde
Le village est construit sur une pente, nous montons souvent des escaliers pour nous enfoncer un peu plus dans la bourgade. Les personnes âgées sont en habits traditionnels, les femmes portent des vêtements bleus marines à noirs, couverts de broderies colorées faites à la main. Certaines femmes portent un bonnet noir, tandis que d’autres ont une serviette de toilette sur la tête. Plus simple, le costume des hommes est moins ostentatoire. Ils portent le plus souvent une ceinture bleue et un torchon noir enroulé autour de la tête. Au milieu du village, je vois un homme à trois pattes, un vieux monsieur qui marche courbé en deux. Il grimpe les escaliers avec prudence et lenteur, équipé d’une canne.
Les grands-mères sur le banc à Langde
Avec Little Miss Tiny, nous cherchons un moment un endroit où dormir et poser nos sacs, nous passons du temps à faire des aller et retour dans le dédale des ruelles. Mais après quelques visites, nous choisissons finalement une chambre à proximité de l’entrée du village. Nous aurions pu ménager nos peines si nous avions posé tout notre barda ici en arrivant, mais l’aventure en a décidé autrement.
Les escaliers en bois grincent sous nos pas lorsque nous montons dans notre chambre, puis nous posons nos fesses sur le lit peu confortable où nous passerons la nuit. Ma femme ouvre la fenêtre pour prendre l’air qui ne contient pas de mélange composite de suie et d'acides et qui ne sent pas la raclette. Il y a une balustrade en bois qui fait comme un balcon. Je décide donc d’aller dehors tel Roméo. Je prends des photos pendant que Little Miss Tiny me déclare son amour depuis son balcon et c’est alors que la pluie s’est mise à tomber.
A 4 heures de l’après-midi, sur la place centrale du village, il y a une animation folklorique. Il pleut à verse mais les filles arrivent avec leurs plus beaux costumes et entament une cérémonie de bienvenue. Elles portent un ingénieux chapeau conique surélevé, au dessus de la coiffe traditionnelle, ce qui les protège de la pluie. Les hommes sont chargés de la mise en musique. Ils bravent aussi la pluie et jouent du lusheng, un instrument à vent en bambou à mi-chemin entre la flute de pan et l’orgue portatif. L’instrument permet aussi de communiquer avec les esprits.
C'est la fête sur la place du village
Ce sont les grands-mères qui terminent l’animation en chantant sans entrain un chant un peu triste.
Mais l’envers du décor est tout aussi intéressant. Sitôt la fête terminée, les vestes multicolores sont remisées et les activités quotidiennes reprennent leurs cours : préparer les repas, s’occuper des cultures, s’occuper des enfants. Les grands-mères discutent, assissent sur un banc sous un préau pendant que le vieux monsieur à trois pattes retournent lentement chez lui.
La pluie ne s’arrête pas et la fraîcheur de l’air s’installe d’autant plus avec la tombée de la nuit. Nous mangeons un repas chaud dans une bicoque en bois avant de rejoindre notre chambre où nous nous endormons doucement sur un matelas dur comme du bois.
A suivre...
Scène de vie quotidienne à Langde

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