Wedding is coming... Un mariage en Chine

Il n’y a pas très longtemps, dans une galaxie pas si lointaine, après une belle rencontre, avec Little Miss Tiny, nous avons décidé de nous marier. C’est rigolo, c’est quelque chose qui est arrivé presque à l’improviste dans ma vie. Je n’étais ni pour ni contre le mariage,  je veux dire que le mariage n’est pas le but ultime d’une relation, mais après tout, j’aime bien les symboles, les instants fabuleux, qui donnent un peu de sens dans une vie souvent absurde. Nous nous sommes mariés en Chine, et un peu comme en France, bien que habituellement je ne prévoie jamais rien, le mariage nécessite de s’organiser à l’avance !
Autrefois, en Chine, avant 1949, l’union était arrangée par les parents, avec parfois l’aide d’une entremetteuse. Parfois, le couple ne s’était même jamais rencontré avant la date du mariage. La fiancée quittait sa maison en chaise à porteur. La cérémonie était très traditionnelle, rituelle et solennelle. Puis, sous l’ère communiste, les traditions ont été abolies. Toutefois, aujourd’hui, de nombreuses coutumes et rituels persistent.
Puisque nous habitons en Chine, nous avons décidé de faire un mariage un peu traditionnel chinois. Plus chinois que les chinois eux-mêmes, d’une certaine façon, car beaucoup de couples chinois choisissent une cérémonie laïque avec un costume et une robe de mariée blanche. Toutefois, la cérémonie traditionnelle revient un peu à la mode.
Je vais maintenant vous conter ces jours heureux, des démarches officiels à la cérémonie en elle-même.

Se marier avec une chinoise

Au début, ce n’est pas très romantique, il y a tout d’abord les démarches administratives : de mon côté, il s’agit de soumettre un dossier afin d’obtenir un certificat à capacité à mariage auprès de l’ambassade de France, du côté de Little Miss Tiny, il y a pas mal de documents d’identités à fournir, le hukou, qu’il faut faire traduire et tamponné par un notaire assermenté. Le hukou, en Chine, c’est un livret d’enregistrement de résidence mais aussi un moyen de tracer la population. Little Miss Tiny a son hukou dans une petite ville du nord de la Chine. L’administration de cette ville était particulièrement incompétente, en fait c’était la première fois qu’ils devaient fournir ces documents pour un mariage avec un étranger, et ils ne savaient pas comment faire. Mais après quelques semaines de tergiversation, nous obtenons tous ces documents, et nous allons passer une entrevue au Consulat de Guangzhou.
L’entrevue permet en fait à l’ambassade de s’assurer que notre projet n’est pas un mariage blanc. Little Miss Tiny était un peu anxieuse, comme avant de passer un examen. Mais l’anxiété peut être positive quand elle est stimulante. Dans la salle d’attente, je lui susurre des mots doux à l’oreille pour la rassurer, puis nous entrons dans le bureau, situé dans un étage à mi-hauteur d’un gratte-ciel de Guangzhou.
La dame qui nous reçoit nous pose quelques questions : depuis quand nous nous sommes rencontrés, quel est notre travail, quels sont nos projets pour l’avenir. La rencontre étant terminée, la dame va envoyer le compte rendu de l’entretien à l’ambassade de Pékin. C’est là-bas qu’aura lieu la publication des bans, une procédure pour rendre publique l’imminence d’un mariage. C’est aussi le moment où le monde entier pourrait s’y opposer. Si quelqu’un a ses raisons, qu’il parle maintenant ou se taise à jamais !
Pour sceller officiellement notre union, nous devons aller à Changchun, capitale de la province du Jilin où est née Little Miss Tiny. Cela correspond en fait au mariage civil, comme la mairie en France. Mais ce n’est ni romantique, ni protocolaire, il n’y a ni famille ni témoin, c’est plutôt comme aller à la poste, il faut juste se rendre au bon guichet, fournir les documents, remplir d’autres documents.
Toutefois, nous devons lire un acte d’engagement, tous les deux en même temps, qui dit que nous prendrons soin l’un de l’autre. Enfin je crois. Little Miss Tiny lit sa version en chinois tandis qu’ils m’ont donné une version en français. Je n’ai rien compris bien que je l’ai lu avec plaisir et amusement, car c’était plutôt des mots français placés dans un sens aléatoire, une traduction automatique peu compréhensible de langage juridique.
Enfin, nous obtenons deux livrets rouges, un pour chacun de nous, c’est le document officiel de notre mariage, le jiehun zheng. A l’intérieur, il y a nos noms, nos dates de naissances, la date de notre union, et une photo d’identité de notre couple, sur fond rouge.
Il y avait une faute à mon nom de famille, alors il a fallu tout recommencer.
A cette étape, nous voilà donc officiellement mariés, au moins du point de vue chinois. 
Le mariage se résume donc à une file d’attente et un papier tamponné par un officier d’état civil !
Dans une rizière à Shulan
Après avoir fait une traduction du livret rouge en français, par un traducteur assermenté, il faut envoyer le tout à l’ambassade de France. Au final, nous obtenons le livret de famille et l’acte de mariage en français.

Les photos de mariage

En Chine, il y a un truc très populaire, c’est faire des photos quelques mois avant le mariage. C’est en fait un peu une pratique rituelle. Il y a en Chine un véritable business du mariage, presque une consommation de masse. Ainsi, on peut trouver des photographes de mariage un peu partout, dans toutes les villes, ce sont de véritables sociétés lucratives.
Il y a donc des studios de photos spécialisés dans la photo de mariage à l’intérieur desquels nous pouvons poser devant des décors artificiels. Il y a des forfaits, nous pouvons choisir le nombre de photos, de tenues, faire les photos entièrement en studio ou à l’extérieur et il est même possible d’aller faire ses photos à l’étranger, pour les chinois les plus aisés. Bref, il y en a pour tous les styles et à tous les prix.
Nous avons choisi d’aller faire nos photos dans un studio à Jilin, dans le nord de la Chine, car c’était moins onéreux, et plus commode pour nous, le jour suivant notre mariage administratif à Changchun.
Nous avions droit chacun à quatre tenues différentes. Tout est à portée de main. C’est Little Miss Tiny qui choisi sa robe dans la buanderie du studio, il y en a de toutes sortes, et de toutes couleurs, des robes de princesse Disney, des tenues de soirée, des robes de mariée blanches de type occidental, des robes rouges traditionnelles chinoises, des qipao. On me donne un costume assorti en accord avec la robe que Little Miss Tiny choisi. 
Little Miss Tiny est toute petite et il n’y a pas de robe à sa taille. Mais ce n’est pas grave du tout. On lui rembourre un peu les nichons, on la ficelle dans le dos et on n’y voit que du feu ! Sa beauté et son élégance font le reste !
Une fois habillé, nous avons eu droit à une session maquillage, puis nous traversons des univers distincts à travers les différentes pièces du studio. C’est le photographe qui choisi le décor, la mise en scène, car ce sont des « services personnalisés » mais des « photos standardisés ».
C’était la première fois de ma vie que je participais à une séance de shooting. Avec Little Miss Tiny, nous sommes les mannequins d’un jour. Nous suivons les recommandations du photographe : asseyez-vous ici, regardez là-bas, souriez, levez un peu la tête, faites attention au double-menton, tenez ça comme ça, tournez-vous sur la gauche.
Au final, nous voilà avec des photos comme dans les magazines, entre glamour et romance, et je me retrouve avec une coupe de cheveux digne des « feu de l'amour ».

La cérémonie

Je vais maintenant vous raconter le jour de la cérémonie de notre mariage, à Shulan, en octobre 2019, dans le nord-est de la Chine.
En Chine, le mariage commence le matin de bonne heure. La veille, nous ne passons pas la nuit ensemble : Little Miss Tiny dort chez ses parents, et je suis dans une chambre, à l’hôtel, qui fait office de chez moi.
Nous nous levons donc à 5:00 du matin pour moi, 4:00 du matin pour ma moitié, après une nuit courte, agitée et peu reposante, chacun de notre côté.
Au réveil, assis au bord de mon lit, différentes émotions se chamboulent dans ma tête, entre excitation et appréhension. Je me remémore la journée de la veille où nous avons répété plusieurs fois le protocole de la cérémonie, les gestes, les mots à prononcer.
Je pense à tout cela, en me rasant devant la glace, dans la solitude de ma chambre, mais je dois faire vite. Je prends une douche pour me remettre les idées en place. Bientôt, une partie de la famille débarque dans la chambre d’hôtel, et tout devient très animé. Mes parents n’ont malheureusement pas pu venir participer à la fête, c’est une tante de Little Miss Tiny qui va jouer le rôle de ma maman. Elle a une botte de poireaux à la main ! Mais j’y reviendrai. Elle m’aide aussi à m’habiller, me congratule, tandis que tout autour, ce sont des cousins qui s’agitent en tous sens, apportent de la nourriture, vérifient la décoration. Ils sont accompagnés d’un photographe et d’un caméraman qui ont pour rôle d’immortaliser ce moment.
Cela me fait tout drôle. J’aime le plus souvent resté dans l’ombre, être un observateur, un contemplatif. Mais aujourd’hui c’est moi qui endosse le rôle d’acteur, je suis au centre de toutes les attentions.
Je dois maintenant retrouver ma promise. Nous sortons tous dehors avec mes garçons d’honneur ; c’est une voiture de location blanche qui vient me chercher, tandis que des pétards explosent dans tous les sens. La voiture m’emporte jusqu’à l’appartement de Little Miss Tiny qui est chez ses parents.
Pendant ce temps là, ma bien aimée se prépare elle aussi, méticuleusement. Elle n’a dormi que deux heures, elle est toute somnolente et c’est une maquilleuse à domicile qui vient lui assurer une mine radieuse et un teint lumineux. Little Miss Tiny aussi est à la fois anxieuse et exaltée. Elle enfile sa robe rouge avec élégance mais, dans l’excitation, ne retrouve pas ses chaussures.
Avec les garçons d’honneur, des amis, des cousins de la famille, j’arrive devant l’immeuble des parents de ma bien aimée. Je l’appelle, je lui crie que je l’aime, mais elle ne m’entend pas. Nous entrons, montons les marches et arrivons sur le seuil. La porte d’entrée de l’appartement est fermée et je dois négocier l’entrée dans la maison en donnant des hongbao au gardien imposant joué par le neveu de Little Miss Tiny. Je dois forcer l’entrée, et c’est au terme d’une lutte symbolique que je parviens à rentrer à l’intérieur de la maison.
Je marche sur le sol de la maison qui a été tapissé de rouge, je dois retrouver ma conjointe qui se cache dans sa chambre. La porte est fermée, Little Miss Tiny doit apprendre à être patiente. Avant d’entrer, je dois demander la permission à sa maman : je dis « kai men » et elle ouvre la porte.
Mon épouse m’attend là, assise sur le lit couvert d’un drap rouge, avec un grand sourire et des yeux remplis d’émotions.
Elle porte une magnifique robe rouge dans le style de la dynastie Ming, avec des phénix brodés en doré. Elle est telle une princesse, avec des épingles à cheveux disposées comme un diadème. Je porte également une robe rouge mais avec des dragons.
Je m’assois près de mon épouse, nous sommes tous les deux à la fois très heureux et très émus. Nous ne nous sommes pas vu depuis la veille au soir, mais nous nous manquions déjà. Nous ne parlons pas trop, mais par notre regard, nous nous comprenons. Tout le monde nous observe autour de nous. Pendant que le photographe nous mitraille sous tous les angles, nous mangeons des raviolis chinois. Ceux-ci ont été fabriqués par la maman et les sœurs de Little Miss Tiny qui se sont levées à 3h du matin pour effectuer la tâche.
Avant de partir et d’emmener ma femme, je dois trouver ses chaussures. Mais Little Miss Tiny n’est pas très ordonnée, ou bien elle a dissimulé ses chaussures de façon volontaire. Elles sont cachées quelque part et on doit m’aider pour que je puisse les trouver, dans un endroit improbable, dissimuler sous des coussins et derrière une plante verte. Ensuite, je peux chausser ses petits pieds, par chance elles sont de la bonne taille, d’où l’expression, trouver chaussure à son pied.
La mariée n’a pas le droit de poser le pied par terre, en dehors de sa chambre, je dois donc la porter telle une princesse pour sortir de la maison. Nous avons un peu triché car je ne l’ai pas porté comme ça jusqu’à chez moi !
C’est ma chambre d’hôtel qui symbolise mon chez moi ; pour y aller, il ne faut surtout pas prendre le même chemin que j’ai emprunté la première fois. Le trajet est considéré comme dangereux pour la mariée qui est alors dans l’entre-deux, dans une zone intermédiaire entre la maison de ses parents et son nouveau domicile, un passage d’une vie à une autre. Nous devons faire tout un détour, afin de tromper d’éventuels malfrats ou mauvais esprits. Et lorsque nous traversons un pont, Little Miss Tiny doit jeter un ruban rouge par la fenêtre afin de se prévenir des entités maléfiques. Nous ne croyons aucunement en ces superstitions mais nous respectons ces pratiques pour le plan symbolique.
Nous arrivons devant l’hôtel, ma chambre symbolise maintenant notre foyer. Les pétards qui claquent à notre arrivé permettent d’éloigner les démons et les fantômes éventuellement de passage. Les membres de la famille qui assistent à notre arrivée nous jettent de petits papiers colorés à notre passage.

Une fois dans notre chambre, nous nous asseyons en tailleur côte à côte sur le lit nuptial, lui aussi couvert de draps rouges. Le caractère « double bonheur » 囍 est affiché au-dessus du lit à côté d’un dessin d’art naïf représentant un couple qui s’embrasse. Nous restons là un bon moment car cela porte bonheur, pendant que les membres de la famille et les autres invités s’agitent, discutent autour de nous. Nous mangeons encore des jiaozi. La nourriture a une signification, un sens en fonction de la prononciation. Les « raviolis de la postérité » 子孙饺子 (zǐsūn jiǎozi) nous permettront d’avoir des enfants, tandis que de longues nouilles nous apporteront une vie longue. C’est un bon présage. Les auspices sont donc favorables. Aussi, des dattes, cacahuètes et graines de melon sont utilisés pour écrire les caractères du mot 早生贵子 (« ayez bientôt un bébé »), placé sur le lit, car quand ces aliments sont dits ensemble, la prononciation ressemble à « ayez bientôt un bébé ». 
On nous offre des poireaux. En chinois, poireau se dit 葱 cōng, ce qui ressemble à 聪明 cōngmíng qui veut dire intelligent. Nous aurons ainsi des enfants perspicaces et astucieux !
Un petit miroir placé dans la chambre est également porteur d’un sens symbolique. Il reflète toutes les mauvaises choses, tout ce qui est défavorable. Ainsi, la maladie et la pauvreté seront éloignées de nous. A côté du miroir, une petite lumière, une veilleuse, va rester allumé toute la journée et toute la nuit pour veiller sur nous. Elle évoque une vie longue.
Quelqu’un arrive avec une bassine rouge remplie d’eau dans laquelle ma femme va se laver les mains, puis faire semblant de se laver le visage, car elle ne veut pas abimer son maquillage.
Après une séance photos avec chacun des membres de la famille et des autres invités, nous partons pour la salle où aura lieu la réception.
Nous arrivons devant la salle du banquet où nous sommes accueillis par une procession. Il y a un concert de pétards et quatre danseurs, revêtus d’un costume de deux lions colorés, contrastent avec la grisaille du ciel. Ils se dandinent et se déhanchent au son fort et saturé d’une musique traditionnelle émanant d’un ampli de mauvaise qualité. Nous n’avions pas le budget pour les musiciens ! Les danseurs sont toutefois très motivés, ils font des mouvements d’acrobatie, se montent sur les épaules, tournoient. Le public est content, applaudit pendant que le bruit des pétards augmente encore en intensité. A la fin de leur présentation, ils se placent près de nous, déroulent deux rouleaux avec des caractères chinois inscrits verticalement, puis nous faisons des photos.
La salle du mariage est remplie de monde, tout le village est invité. A l’entrée, une photo de nous deux, presque grandeur nature, informe tout le monde de l’heureux événement. La cérémonie du mariage a lieu avant le banquet. Avant notre entrée en scène, il y a eu un théâtre d’ombre chinoise dont nous avons écrit l’histoire nous-mêmes. Au début, nous n’étions pas d’accord, j’avais écrit une histoire un peu plus symbolique et métaphorique, tandis que Little Miss Tiny voulait quelque chose de plus romantique et pragmatique. Nous avons donc fait des compromis, puis écrit notre histoire en anglais avant de la traduire en chinois.
Le jour de la cérémonie, ce sont des cousins plus ou moins éloignés qui ont tenu le rôle des deux marionnettes de notre histoire. Ces figurines sont faites de parchemin translucide délicatement découpé et peintes de jolies couleurs flamboyantes ; elles sont animées grâce à des baguettes et leurs ombres portées derrière un écran de tissu blanc donnent des silhouettes très esthétiques et oniriques.
Le déroulement de l’histoire était accompagné d’une musique traditionnelle, Le Chant du Pêcheur au Crépuscule (渔舟唱晚), au guzheng (古箏), un instrument à cordes pincées de la famille des cithares sur table. C’est une petite fille d’une dizaine d’année qui jouait de cet instrument, une cousine éloignée de la famille ; elle m’avait déjà beaucoup impressionné la veille, lors des répétitions, et cela faisait déjà plusieurs semaines qu’elle s’entraînait pour nous. J’ai beaucoup aimé la prestation que j’ai pu apprécier dans sa globalité. Pendant ce temps, Little Miss Tiny avait la tête recouverte d’un tissu en soie rouge ce qui n’avait pas de rapport avec un moyen de protection face au coronavirus.
Les acrobates font de nouveau une danse du lion, le maître de cérémonie, ou marieur, introduit la cérémonie au micro, puis nous entrons en scène. C’est moi qui inaugure les célébrations. Je ne comprends pas toutes les informations du maître de cérémonie qui parle en chinois, mais j’ai répété la veille alors je fais ce qu’on m’a enseigné. Je marche sur une estrade qui traverse la salle pour me diriger à l’autre extrémité de la salle, tout en souriant et en saluant les convives. 
Puis je retourne chercher ma femme. Je marche devant, tandis que ma femme ne voit absolument rien, la tête cachée sous un voile rouge, elle me suit de près, accroché à moi grâce à un ruban rouge sur lequel une fleur est tressée au milieu.
Je dois enjamber un feu, c’est le premier obstacle à affronter. Mais rassurez-vous, ce n’est pas un vrai feu, juste une imitation, une pièce de tissu orange qui s’agite dans un flux d’air. Le deuxième obstacle est un objet étrange en arc de cercle que je dois enjamber et dont j’ignore la signification. Ma femme me suit tout le long du trajet.
Le marieur me remet un arc en bois et je dois tirer trois flèches, l’une vers le haut, pour le Ciel, l’une vers le bas, pour la Terre, et l’autre droit devant moi, ce qui symbolise l’harmonie et l’union du Ciel et de la Terre. Devant moi, il y avait les parents de ma jolie femme, assis chacun sur une chaise, et j’avais peur d’en éborgner un au passage. Mais finalement tout s’est bien passé.
Nous arrivons enfin à l’extrémité de la salle, telle une scène de théâtre, là où sont assis les parents de Little Miss Tiny.
Le marieur me donne un bâton, que je dois nommer « xigan », puis je l’utilise pour soulever délicatement le voile de ma bien aimée. Le suspense est haletant mais pour maintenir une attente émotionnelle, je soulève doucement le voile, par trois fois, petit à petit, ne dévoilant que le menton, puis la bouche, et c’est la troisième fois que je dévoile entièrement son visage au monde entier. Le voile s’accroche un instant au diadème, mais l’effet de surprise est immédiat. L’instant est suspendu, de la Terre du Milieu à Westeros, de Tatooine à Aldébaran, le monde est ébloui et troublé par la douceur et la beauté de ma femme. 
Je suis dans une telle euphorie que j’en oublie ce que je dois faire. J’ai l’air un peu benêt car je ne comprends pas ce que dit l’animateur, et ma femme me tire la veste pour attirer mon attention sur le fait que c’est le moment où nous devons remercier le public en nous inclinant par trois fois, les mains jointes. Puis nous nous retournons vers les parents de Little Miss Tiny, nous faisons mine de laver nos vêtements des souillures, puis nous nous inclinons à genoux, par trois fois, par respect envers les parents. Les parents restent impassibles et ne montrent aucune émotion, dans une attitude toute confucéenne. Mais Maman Little Miss Tiny me dira ensuite qu’elle était à la fois anxieuse et émue. 
Le maître de cérémonie fait un long discours pour dire que nous nous aimons et que nous allons prendre soin l’un de l’autre. Puis, c’est le moment de la cérémonie du thé.
Le thé semble avoir une place importante dans les mariages chinois depuis longtemps, au moins depuis la dynastie Tang, il y 1 400 ans. Il était un présent de valeur, faisait partie de la dot. Il symbolise le respect, la loyauté et la perspective d'une vie conjugale heureuse. La pratique du « jing cha » ou « servir le thé avec respect » implique pour moi la promesse que je prendrai soin de ma femme et que je respecterai ses parents.
La cérémonie du thé
Je commence par donner une tasse de thé à Papa Little Miss Tiny en lui disant, en chinois, « Papa, s’il-vous plait buvez du thé ». C’est un changement de titre, je peux l’appeler Papa car je fais maintenant parti de la famille. Implicitement, je lui demande aussi l’autorisation de prendre sa fille pour épouse. Il me donne ensuite en échange un rouleau de bambou contenant un texte calligraphié de philosophie confucéenne donnant des recommandations pour rendre soin d’une famille.
Je vais ensuite donner une tasse de thé à Maman Little Miss Tiny. Le rituelle est le même, je demande « Maman, s’il-vous plait, buvez ce thé ». Elle accepte. Le maître de cérémonie lui demande si le thé est sucré, elle lui répond que oui, c’est une manière de dire qu’elle accepte notre mariage. Puis elle me donne une enveloppe en tissu rouge brodée de dorée et rempli de billets. Enfin, nous nous avançons tous les quatre sur la scène pour nous incliner et remercier le public.
La musique change. Les parents se rassoient. Nous nous faisons face avec ma femme, nous nous agenouillons, et nous inclinons par trois fois. Les yeux de Little Miss Tiny se remplissent de larmes d’émotions. Ses larmes se transmettent tel un virus et je me mets à pleurer moi aussi.
Nous nous relevons et une demoiselle d’honneur nous présente ensuite une calebasse coupée en deux. Elle rempli les deux morceaux d’un vin un peu sucré, et nous buvons en nous croisant les bras. Puis nous rassemblons les deux morceaux pour les attacher avec un ruban de soie rouge, cela symbolise notre union.
Avant de terminer la cérémonie, nous avons diffusé le montage photos et les vidéos qu’avait préparé ma famille. Nous avions choisi une vieille chanson d’amour des années 1960, « Ain’t No Mountain High Enough » de Marvin Gaye et Tammi Terrell qui nous correspondait bien pour notre reportage photographique. La voix de ma maman m’a beaucoup touché lorsqu’elle a fait la rétrospective de ma vie jusqu’à la rencontre de Little Miss Tiny.
Après cet instant d’émotion et d’apaisement, le banquet commence dans le brouhaha et la débandade.
Nous voilà unis. Rien ne change et pourtant tout change
Ils se marièrent, vécurent heureux et eurent combien d’enfant.
Ici un montage vidéo qui résume notre mariage:

Commentaires

nadette a dit…
merci quelle émotion je vous souhaite beaucoup de bonheur attention à vous avec ce virus qui est très présent chez vous et chez nous
a bientôt pour d'autres événements
nadette a dit…
merci quelle émotion je vous souhaite beaucoup de bonheur attention à vous avec ce virus qui est très présent chez vous et chez nous
a bientôt pour d'autres événements
mamounette a dit…
Merci pour ce conte de fée qui m'a beaucoup fait pleurer. Prenez soin de vous, je vous aime, vous me manquez tant .
Fraal a dit…
C'est vraiment formidable de pouvoir partager virtuellement un grand moment de votre vie. Je vous souhaite beaucoup, beaucoup de bonheur .