Qu’est-ce qu’on mange en Chine?

Un repas avec le labo et des invités étrangers
Lorsque je voyage ou lorsque je suis expatrié dans un pays étranger, j’aime découvrir la nourriture du coin. Avec little miss tiny, on aime bien manger, cuisiner ou aller au restaurant. Le sujet de cet article sera donc la cuisine chinoise.
Tout d’abord, vous pouvez oublier le petit resto chinois en France, car ce que mange les chinois en Chine n’y ressemble en rien. Moi j’aime beaucoup, c’est presque une des raisons qui m’ont fait émigré en Chine. Il y a ici une grande diversité culinaire et c’est vraiment bon. Bref tout l’inverse du Canada qui a plein d’autres qualités mais qui est un vrai ennuie culinaire.
La cuisine chinoise, c’est variée, c’est un subtil mariage des aliments, c’est une palette fabuleuse de spécialités, de goûts et de saveurs.
Je dis souvent que c’est un truc qu’on partage entre Français et Chinois, l’amour de la bonne cuisine. Confucius aurait dit que « la nourriture est le premier besoin des gens ». Manger, c’est aussi un moment pour se retrouver, partager un moment convivial.
Mais il y a plus, manger n’est pas seulement un moyen de se remplir la pense, il y a du sens, les aliments ont une symbolique en eux-mêmes. Les mets présentés sur la table ont une interprétation, le plus souvent la chance et la richesse, l’espoir de s’enrichir. Les chinois sont-ils cupides ? Sans doute un peu. Mais c’est probablement au moment du nouvel an chinois ou lors d’un repas de mariage que ce qu’on mange, à tel moment et à tel endroit, à le plus de sens.
Un autre exemple souligne l’importance de la nourriture, « Chi fan le ma? » qui signifie littéralement « as-tu mangé ? » est un moyen de se saluer lorsqu’on se rencontre.  
Bon appétit bien sûr

C'est bien les grandes tables : l'étiquette

Lorsque je vais au restaurant avec beaucoup de monde, par exemple un repas avec les membres du labo, ou bien un repas de famille, nous nous installons autour d’une grande table ronde. Il n’y a pas de plat et d’assiette individuels, comme nous en avons l’habitude en Europe, mais les plats sont servis pour tous les convives au milieu de la table. Au milieu de la table, une plaque tournante permet à chacun de faire venir le plat convoité à lui, ou bien chacun pioche son morceau de canard laqué ou poisson vapeur à tour de rôle.
S’il y a du poisson, la tête du poisson doit être orienté tel que pointant vers la personne la plus importante des convives, un invité de marque, le chef de l’entreprise ou le doyen du groupe.
Les chinois aiment manger en mâchant et en buvant bruyamment. Cela veut dire que le repas est bon.
Souvent, les chinois commandent plus que ce qu’ils ont réellement la capacité de manger. Ainsi, nous nous retrouvons à la fin du repas avec de nombreux plats à peine entamé mais plus personne n’a faim. Je peux trouver à cela quatre explications. Il y a une histoire de « face », par exemple, si un des convives veut offrir le repas à ses invités, il ne doit pas montrer qu’il est avare mais au contraire afficher sa richesse en commandant une multitude de plats. C’est aussi afficher son hospitalité. La deuxième explication est en faite plus une question de politesse, non pas pour montrer sa richesse, mais pour éviter de se sentir mal à l'aise si les invités n'ont pas assez mangé. Il est rigolo de comparer la situation avec le Japon qui est tout a fait l'inverse, il faut finir son assiette, car si il y a des restes, cela veut dire que le repas n'etait pas assez bon. La troisième explication, c’est que jusqu’à la fin du siècle précédent, ne pas manger à sa faim pouvait être quelque chose de courant, du coup, les chinois se rattrapent. Enfin, la dernière explication que je suggère est, je pense, tout simplement que les chinois sont gourmands. Ils veulent essayer tous les plats de la carte.
Tout n’est pas que gaspillage. En Chine, à la fin du repas, il est facile de demander au serveur une boîte pour remporter les restes à la maison. Pour se faire, il suffit de dire dabao 打包 qui se traduit littéralement par "demander un petit sac pour emporter les restes"
Les chinois aiment manger et les restaurants en Chine sont nombreux, du boui-boui au coin d’une ruelle au restaurant sophistiqué, de la cuisine sichuanaise à celle du nord-est, il y en a pour tous les goûts. La nourriture en Chine n’est pas onéreuse, ce qui est avantageux pour le client mais moins bien pour le restaurateur. Je suis souvent surpris de voir un nouveau restaurant qui ouvre, puis qui ferme au bout de deux mois pour être remplacé par un nouveau restaurant après quelques jours de travaux pour refaire toutes les peintures et changer le mobilier.
On a testé pour vous
Les chinois aiment voir les choses vivantes avant de les manger. C’est une preuve de fraîcheur. Il y a certains restaurants qui exposent des aquariums dans lesquels on peut choisir poissons, crabes ou crevettes. Puis quelqu’un peut tuer le poisson devant nous, à coup de massue, un peu à la manière de Maïté. Le poisson cuisinée est ensuite présenté en entier, avec sa tête et ses arrêtes. Le poisson pané n’existe pas en Chine.
Une autre fois, c’est une araignée de mer qu’on m’a présenté. Celle-ci ne pensait qu’à s’échapper de la table, mais quelqu’un l’a plongé directement dans son bouillon en ébullition avant de la déguster goulûment. 
C’est aussi le cas au marché de rue, mais également au supermarché, les poissons sautent d’un aquarium à un autre en espérant peut-être rejoindre la mer, les coquillages me crachent un jet d’eau à la figure, les homards me regardent d’un air féroce et exhibent de manière ostentatoire leurs pinces. Moi j’aime visiter le marché un peu à la manière d’un zoologiste, j’explore la biodiversité du vivant, la richesse des formes et des comportements.
Au marché, avec little miss tiny, nous allons souvent acheter des nouilles fraîches pour les cuisiner avec amour le soir même. Non loin de la maison, dans une échoppe, un artisan confectionne à longueur de journées des pâtes de différentes formes. Il a les mains et les cheveux saupoudrés de blanc, couverts de farine tandis qu’au fond de sa boutique, les pâtes sèchent accrochées à un étendage.
La Chine offre une grande diversité de plats. Les chinois, tout au long de leur histoire, on su élaborer des recettes avec tout ce qui provient de la terre, tout ce qui nagent, volent ou marchent. Il y a aussi différentes spécialités, en fonction des régions. La cuisine du Sichuan ou du Henan est très épicée. Le poivre du Sichuan me donne une sensation de picotement en bouche, une impression étonnante, un mélange piquant et anesthésiant à la fois. J’adore ça ! La cuisine du Guangdong, au contraire, n’est pas épicée, mais il y a souvent un mélange de sucré-salé. Les habitants du nord aiment les arômes forts, litlle miss tiny utilise par exemple beaucoup d’ail et de vinaigre lorsqu’elle cuisine. En Chine, on dit que « le sud est sucré, le nord est salé, l’est est aigre et l’ouest est pimenté ». Mais la variété des parfums, les mélanges des arômes sont en réalité bien plus complexe. L’huile de sésame, la sauce soja et le gingembre sont souvent des éléments essentiels.
Avec little miss tiny, nous sommes rarement déçus après avoir mangé dans un restaurant. La cuisine est riche et généreuse. Les aliments sont cuits à la vapeur, ou bouillis, ou fris dans l’huile. Little miss tiny m’apprend qu’il y a plein de mots en chinois qui peuvent se traduire en français par frire, mais qui correspondent en réalité à des subtilités différentes, en fonction de la quantité d’huile, des sauces ou des poêles utilisées, du niveau de cuisson et ainsi de suite.
La Chine du Nord Ouest utilise plus couramment les nouilles 面条 tandis que dans le reste de la Chine, c’est le riz 米饭 qui est important. Mais le riz ne sert qu’à accompagner le plat, c’est peut être un peu comme notre pain français. La culture du riz apparaît en Chine, au Néolithique, il y a environ 10 000 ans, tandis que l’archéologie montre que des nouilles étaient fabriquées en Chine il y a 4 000 ans à partir de farine de millet. Les nouilles peuvent être consommées un peu comme notre manière européenne avec une sauce, ou bien plongées dans une soupe.
Chez le marchand de pâte
Les raviolis chinois, ou jiǎozi 饺子, sont bien sûr un met très apprécié dans toutes les régions de Chine. Ils peuvent être fourrés d’un mélange de viandes ou d’un mélange de légumes, avec toutes les variantes possibles. Ils peuvent être cuit directement dans l’eau, ou bien à la vapeur, ou encore grillé à la poêle. On les mange le plus souvent après les avoir trempé légèrement dans une sauce soja mélangé à des épices de son choix. Il y a des variantes comme les wonton (ou húntun en mandarin) qui sont bouillis et servis en soupe. Les bāozi 包子, que j’apprécie énormément, sont une autre variante, un genre de petit pain fourré à la vapeur.
Les champignons du marché et cet étrange tubercule
La cuisine chinoise utilise également une grande diversité de légumes. La Chine est en fait le plus grand producteur de fruits et légumes au monde. Au marché, il est possible de retrouver tous les légumes que l’on rencontre en France, à l’exception notable peut être du choux de Bruxelles. Une large variété de choux est présente sur les étalages, les courgettes sont un peu différentes que celles du jardin de mon papa. Les racines de lotus, les pousses de bambous et les germes de soja sont des ingrédients couramment utilisés. Il y a énormément de légumes verts, avec des feuilles de toutes tailles et toutes formes mais aussi toutes sortes de racines et légumes sous-terrains comme un radis blanc géant, le taro, un autre tubercule, l’igname de Chine comme une drôle de pomme de terre allongée. Par ailleurs, les chinois savent aussi cuisiner l’aubergine tout en délicatesse, fondante juste comme il faut.

Les trucs bizarres

Je vais maintenant casser une idée reçue. La plupart des chinois n’ont jamais mangé de chien, ni d’insectes. Par contre, ils sont friands des pattes de poulets. Moi je trouve ça peu intéressant sur le plan gustatif et c’est cartilagineux. Mais little miss tiny adore sucer tous les petits os. Elle y prend autant de plaisir que moi avec une tartine de nutella !
Des pieds de cochons
Les chinois aiment beaucoup les abats. Intestin et estomac de porc, sang, cœur et langue de canard : en fait, tout est comestible dans l’animal ! Moi cela ne me dérange pas, en France j’aime les tripes, les andouillettes et le boudin. Les chinois aiment aussi manger crapauds et grenouilles et sont surpris que j’apprécie moi aussi ce met. Finalement, en France comme en Chine, nous mangeons presque tout ! Bientôt, je ferais goûter nos escargots à little miss tiny.
- Un peu de poulet ? - Oui, juste un doigt.
Les œufs de cent ans rebutent souvent les étrangers à cause de leur couleur noire. Moi j’aime beaucoup, surtout avec la sauce qui accompagne agréablement ce plat. Le goût de l’œuf est bien prononcé, le jaune d’œuf devient verdâtre et le blanc d’œuf devient brun noir avec une consistance gélatineuse, ça ressemble en fait à la gelée qui entoure le pâté en croûte. C’est bon, n’en faites pas tout un cirque ! L’œuf est en fait placé quelques semaines à quelques mois dans un mélange de chaux, de cendre, de sel et de feuilles de thés. Il y a ensuite une réaction chimique, une sorte de fermentation et de macération et les protéines de l’œuf sont dénaturées.

Les spécialités

Dans le Guangdong, le dim sum ou zaocha 早茶, littéralement le thé du matin, est une activité populaire. Avec little miss tiny, on aime ça le dimanche matin pour le petit déjeuner ou plutôt le brunch car c’est un petit déj très copieux qui nous permet de tenir la journée. Nous buvons du thé tout en savourant toutes sortes de beignets, de petits pains, de raviolis, le plus souvent cuit à la vapeur et servi dans des petits paniers en bambou, juste légèrement sucré, avec toute sorte de formes, de couleurs et de parfums, fourrés de pâte de haricots rouges, de légumes ou de viande, au miel ou caramélisés. C’est délicieux. On aime y aller en amoureux, on y va parfois aussi entre collègues de travail. Plus nous sommes nombreux et plus nous pouvons goûter de trucs différents.
Il y a aussi une drôle de tradition dans le sud. Avant de manger nous utilisons le premier bain de thé pour laver nos assiettes et nos baguettes. Certains disent que c’est pour désinfecter la vaisselle, mais je crois que c’est plus de l’ordre du rituel que de l’efficacité.
Zaocha ci-dessus à plusieurs et ci-dessous version couple
Le huoguo 火锅, ou fondue chinoise, est toujours très populaire en Chine, c’est aussi un de mes plats favoris. C’est un plat convivial avec un bouillon, chauffé et placé au milieu de la table, dans lequel les convives trempent leurs ingrédients, légumes, algues, champignons, tofu, viande ou poisson. Une alchimie de saveur se produit alors dans la marmite. Une fois cuit, on peut tremper son aliment dans une sauce avec des condiments de son choix, un peu comme pour une fondue bourguignonne. Le huoguo est originaire de Changchun mais il existe plusieurs spécialités locales et c’est surtout le bouillon qui change, celui-ci peut être très épicé ou pas du tout. Souvent, il y a une grosse marmite séparée en deux par une cloison : d’un côté le bouillon pimenté, de l’autre, le bouillon parfumé. Il faut alterner les deux, un peu à la manière du yin et du yang. Le huoguo a une odeur caractéristique qui imprègne les vêtements, c’est un peu comme la raclette, on peut savoir ce qu’on a mangé la veille si on ne change pas ses vêtements !
Le huguo, dans ce restaurant il y a aussi des animations théatrales
Je dois terminer avec mon favoris je crois : le malaxiangguo 麻辣香锅. Au restaurant, il y a un réfrigérateur dans lequel je peux choisir par moi-même les ingrédients que je veux mettre dans mon malaxiangguo, toutes sortes de légumes, des boulettes de viande, des saucisses, des champignons. Le prix varie en fonction du poids des ingrédients qu’on achète. Ensuite le cuisinier fait une précuisons des aliments à la vapeur puis ceux-ci sont cuisinés dans une grande poêle, un wok, avec une sauce très parfumée et toutes sortes d’épices et aromates. C’est vraiment excellent, un régal pour les papilles, un moyen d’accéder à la félicité et à la béatitude.
Mon malaxiangguao personnalisé et le réfrigérateur où je choisi mes ingrédients 
Des huîtres façon barbecue
« La cuisine est l’art d’utiliser la nourriture pour créer du bonheur ». Sur ce point, les chinois ont tout compris.

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