Balade à Mandalay : La Birmanie (1)

Pendant les vacances du nouvel an chinois, je suis allé dans un pays à l’intersection de la Chine, l’Inde et la Thaïlande.
La Birmanie est longtemps restée isolé du reste du monde, en raison d’une dictature militaire, mais c’est paradoxalement ce qui fait qu’elle a été préservée des influences extérieures et conservé son originalité. Depuis 2011, la voie du changement arrive avec l’arrivée de la démocratie et de l’ouverture.
La Birmanie a beaucoup fait la une de l’actualité ces derniers mois avec la crise des Rohingya dans l’état d’Arakan. Cette région est interdite d’accès aux touristes, mais la situation a aussi nettement diminué le nombre de touristes dans toute la Birmanie. Aussi, la persécution de cette minorité musulmane peut paraître difficile à comprendre, en opposition totale avec la voie non violente du bouddhisme.
J’ai rencontré d’autres musulmans pendant ce voyage, qui semblaient, du moins en apparence, cohabiter avec le reste de la population, j’ai vu des musulmans et des bouddhistes discuter ensemble au marché, il y a des mosquées qui font l’appel à la prière, quelque chose qui n’est par exemple pas accepté en France. Toutefois, depuis 2012, il semble bien qu’une ligne de fracture entre les deux communautés se soit dessinée. Alors pourquoi les Rohingya se retrouvent dans cette situation ?
En discutant avec un guide, entre Kalaw et le lac Inle, il nous a dit que pour lui, les Rohingya n’étaient pas birmans, ce qui est discutable. Non pas qu’il soutenait les persécutions, mais il préférait voir le problème en dehors de la Birmanie. Il était surtout inquiet qu’un trop grand nombre de conflits ethniques aux marges du pays n’amènent les militaires à reprendre le pouvoir dans cette démocratie fragile.
Le conflit entre Rohingya et bouddhiste est en réalité ancien, depuis la colonisation britannique, l’indépendance du pays en 1948, la mise en place de la dictature militaire en 1962 et du nationalisme. La région de l’Arakan est une région pauvre, et comme souvent, les Rohingya sont les boucs émissaires de frustrations économiques et politiques.
Ici, ce numéro du dessous des cartes fait le point sur la situation.
Depuis plusieurs années, j’étais curieux de connaître ce pays, j’ai donc choisi d’aller voir comment c’était.
Comme d’habitude, je n’avais rien préparé à l’avance, mais je vais maintenant un peu vous raconter ce périple.
Je suis arrivé à Mandalay, où j’ai pu passer une journée pour découvrir la ville. Je pars à pied un peu dans l’inconnu, pas si facile de flâner, traverser la route sans feu de signalisation et sans passage piéton et parfois difficile. A priori, je ne peux pas me perdre, les rues sont quadrillées, orientées nord-sud ou est-ouest, de plus, elles sont numérotées, à l’angle de la 28e et de la 81e rue, je me croirais à New-York.
La plupart des gens se déplacent en moto, il n’y a pas de marcheurs. Un chien errant qui doit trouver étrange de voir un être humain se déplacer sur deux pattes se met à m’aboyer dessus. Je passe devant un cinéma devant lequel de nombreuses motos sont stationnées.
Puis j’arrive à un marché où j’ai passé beaucoup de temps. J’aime bien toutes ces couleurs, les senteurs, les légumes frais, les épices, le poisson séché et les scènes de vie. Je me trimbale dans le dédale des rues animées et fais quelques photos à l’improviste. Les livreurs, à moto ou à charriole tirée à main nue, tentent de se frayer un passage dans cette anarchie apparente. Les dames portent leurs produits sur leur tête. La plupart des femmes et des enfants arborent le thanaka sur leur visage, mais parfois aussi quelques hommes.
Le marché à Mandalay
Il y a une minorité indienne en Birmanie et je suis rentré dans un temple hindou. Un énorme toi en forme un peu pyramidale est tapissé de sculptures colorées de nombreuses divinités, un peu comme en Inde du Sud. A l’intérieur du temple, un homme torse-nu, au ventre proéminent, fait le tour de toutes les statues, il leur balance un liquide à la figure puis fait tournoyer une flamme d’une petite bougie devant leurs yeux. Pendant ce temps là, un autre homme fait sonner une cloche.
Dans le quartier, je trouve un restaurant indien, j’en profite pour me nourrir et je retrouve des saveurs d’un précédent voyage, ma madeleine de Proust, l’Inde c’était en 2013 déjà.
Comme j’aime voyager en train, je suis allé à la gare m’acheter un billet pour le lendemain. Il n’y a pas de sous titre en anglais à la gare, mais c’est assez facile, j’ai montré sur un plan où je voulais aller et j’ai eu mon billet. Il n’y a aucun système informatique, le préposé est assis à son guichet en bois, il a des listes et des petits bouts de papiers, je ne sais pas trop ce qu’il fait avec. Mais il finit par me donner mon billet, remplit à la main, avec mon nom, ma destination et le tampon pour certifier l’ensemble.
Billetterie à la gare de Mandalay
Je poursuis mon exploration de la ville.
Les temples sont différents de ce à quoi je m’attendais, enfin en fait l’architecture n’est pas la même que ceux de Thaïlande ou du Laos, et en fait ici c’est plutôt des pagodes. A l’intérieur, il y a un bien des bouddhas qui me regardent d’un œil me signifiant la compassion et l’impermanence de toute chose, mais l’ambiance est différente. 
Je suis allé voir le temple Mahamuni, à l’intérieur il y a de grandes colonnes qui retiennent un plafond vouté, elles sont peintes dans une couleur dorée et rouge. De-ci de-là, des petits bouddhas et bodhisattva se tiennent dans des alcôves. Mais le plus gros des bouddhas se trouvent au milieu, il s’agit d’un des sites les plus sacrés de Mandalay. En effet, c’est un bouddha très vénéré, des miracles lui sont attribués, et de nombreux pèlerins viennent lui rendre visite. Des hommes, en file indienne, font la queue pour s’approcher au plus près du Bouddha et lui coller des feuilles d’or sur le dessus, à l’exception de son visage. Le bouddha est donc tout boursoufflé, bombé de pustules .Les femmes n’y ont pas droit, mais elles s’assoient et font des prières juste en face.
Appliquer une feuille d’or sur le bouddha apporte chance et un meilleur karma. Il y a donc tout un marché dans ce domaine, et des ateliers de fabrication, avec des batteurs d’or. Le batteur martèle ainsi, de façon continue, des bouts d’or intercalé dans des feuilles de bambou. Le morceau d'or devient tout plat, et il peut le revendre à prix d'or !
Autour du temple, il y a de nombreuses boutiques de bondieuserie et divers artisanats : des sculpteurs de bouddha, en pierre, en marbre ou en bois. Il y a une poussière blanche incroyable et je plein les conditions de travail des ouvriers. A côté, il y a des fabricants de gongs, de cloches, des bols, des boîtes. Ici, tout est fait à la main.
A la nuit tombée, je vais manger un curry birman, je n’ai pas eu le temps d’aller voir le célèbre pont U-Bein. Le lendemain, je dois prendre le train de bonne heure. La suite au prochain article.
A bientôt.

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