Passe ton gaokao d'abord

Sculpture à Jiao Tong University (Shanghai)
Pendant qu’en France avait lieu le rituel du bac, ici, en Chine, c’était son équivalent chinois, le gaokao. Un peu comme en France, il met fin à la période du lycée, il est un symbole mais aussi un sésame. On peut situer son origine dans les anciens examens de sélection des fonctionnaires impériaux (qui ont lieu de 605 à 1905). De plus, avec la tradition confucianiste qui considère l’éducation comme une valeur importante, cet examen, qui met en concurrence des millions d’élèves, est une source de pression et de stress pour les jeunes étudiants. Le rater signifie ne pas pouvoir entrer à l’Université et décevoir sa famille.
En quelque sorte, c’est un examen qui change la vie. C’est l’espoir d’une progression sociale. Le score que l’étudiant obtient lors du gaokao lui permettra de choisir parmi les meilleures universités du pays, ou non. Et les meilleures universités permettront d’obtenir un meilleur emploi et un meilleur salaire. D’un côté, c’est une méritocratie, les jeunes issues de milieu défavorisé peuvent avoir l’espoir d’améliorer leur condition dans l’avenir, mais dans la réalité, les études ne sont pas gratuites en Chine, donc inégalitaires. Tout le monde n’a pas accès au gaokao. De plus, les meilleures universités sont à Shanghai ou à Beijing, mais les étudiants originaires de Shanghai ou Beijing peuvent se permettre d’obtenir une moyenne inférieure, pour intégrer l’université prestigieuse, par rapport à un étudiant de Pétaouchnok.
Ainsi, en Chine, il y a les universités de première classe, et les universités de seconde classe, et probablement de troisième classe. Bien évidement, l’état donne plus d’argent aux premières. Les dispositifs d'égalité des chances à l'école française sont-ils efficaces ? Ils ont le mérite d’être mis en place.
Le système éducatif à la chinoise est actuellement l’objet de critique, même en Chine. Il privilégie la connaissance et les réponses standardisées, sans stimuler l’esprit critique et les capacités d’imagination ou de créativité des étudiants. Il favorise la mémorisation mais laisse peu de place à l’originalité. Apprendre à suivre le mouvement, faire comme les autres, plusieurs de mes amis m’ont indiqué qu’ils étaient passé par cela. Et ils se rendent compte que ce n’est peut être pas une bonne idée.
Le système universitaire ressemble à ce qu’il se fait ailleurs, avec l’équivalent de la licence, la maîtrise et le doctorat.
Mais quelle est la vision du futur de tous ces jeunes chinois ? Difficile à dire. Parfois, je me laisse aller à comparer avec ce qui se passe en France. En France, là où tout est plus facile, le système de protection sociale, le système de santé, le droit à l’erreur, l’égalité des chances, l’importante quantité de jours de vacances, il y a pourtant un réel pessimisme. Peut être la peur que le futur soit moins bien qu’avant. En Chine, là où tout est plus complexe, compétitif, pas de vacances ni système de retraite et des salaires faibles, les jeunes semblent plus optimistes. Ils ont l’espérance que leur vie sera meilleure que celle de leur parent. Et bien qu’ils soient bridés par le gouvernement en place, les chinois n’ont jamais été aussi libres de leur histoire qu’aujourd’hui. Toutefois, cet optimisme de façade cache des subtilités. En France, les politiciens des gouvernements successifs n’ont malheureusement aucune vision de l’avenir, ils n’ont aucun projet de société à proposer. En Chine, l’absence de démocratie fait que le chinois n’a aucune prise sur le futur. Dans sa fuite en avant, sur la décision de ses parents, il se retrouve à faire des études qu’il n’a pas choisi. Avec le temps, il se retrouve là, du jour au lendemain, avec une blouse sur le dos, assis sur un tabouret devant un microscope.
à l'Université de Yangling
Ces dernières années, des nouveaux campus se construisent, des grands campus avec des espaces verts, à l’américaine. Les conditions d’études peuvent être inégales, beaucoup de lieux sont encore très vétustes. Les conditions peuvent être rudes, des amis que j’ai visité doivent vivre, le plus souvent, dans des dortoirs de six personnes, sur des lits superposés, même pour des étudiants en maîtrise ou en doctorat. Les chambres n’ont pas de système de chauffage et les douches peuvent être loin, dans un autre bâtiment. Mais il y a de nombreuses cantines, réparties sur le campus, ouvertes matin, midi et soir (enfin le dîner ici se prend entre 5 et 6 h).
Au mois de mai, je suis allé rendre visite à une amie, à XiAn, en fait à Yangling, à 80 km à l’ouest de XiAn. Elle m’a fait visiter son université, la Northwest Agriculture and Forestry University. J’ai également visité son labo, mon amie cherche à extraire des seconds métabolites à partir des bactéries du sol, et d’en identifier les propriétés.
Puis nous avons arpenté le muséum d’histoire naturelle et d’entomologie, associé à l’université. C’est en contemplant un panneau avec de oiseaux, un peu similaire, mais un peu dissemblable, appartenant à différentes espèces, tous référencés par des caractères chinois complexes différents, que mon amie m’informe qu’elle ne peut tout lire. Elle est incapable de nommer chacun de ses oiseaux. Et il n’y a pas le nom latin pour nous aider. Il reste à mon amie encore des caractères à apprendre ! Cela me rassure un peu… ou pas… Après une virée en bus, nous voilà à la Agricultural Hi-tech Industries Demonstration Zone. Il s’agit de montrer que l’agriculture en Chine, c’est moderne ! Nous passons d’une serre à une autre, les fleurs, les fruits, les légumes, les semences et l’agriculture hors sol. Mais c’est aussi une belle place pour discuter et prendre des photos.
Comme souvent lorsque je vais à XiAn, nous avons aussi passé beaucoup de temps à manger. Entre des spécialités de street food local et des noodles, il y a eu par exemple ce poisson, frit et bouilli, ou bouilli et frit, je ne sais plus, qui fini par se retrouver là, posé sur la soupe.

Commentaires

Anonyme a dit…
Merci pour tes comparaisons Chine/France qui nous font bien réfléchir.
Tes commentaires sont toujours intéressants et profonds.
Mais que serait Julien en Chine... sans les chinoises ?
Bisous de Montpellier d'Elena et Jacques