En passant par le Henan

Centre ville et marché de Kaifeng
Au mois d’août, un collègue m’a indiqué qu’on pouvait quitter le labo pendant une semaine. Cela ressemble un peu à des vacances et c’est sans scrupule que j’ai examiné les cartes dans le but de choisir une province à explorer.
Le vendredi soir, j’étais dans un train pour un trajet de nuit en direction de Kaifeng (开封) dans le Henan (河南). Le Henan, c’est une région dans le centre est de la Chine, traversée par le Fleuve Jaune. Elle abrite le berceau de la civilisation chinoise. En dehors de Luoyang qui est touristique, il y a peu d’étrangers dans cette province. J’aime bien, cela donne l’opportunité de s’immerger dans la culture chinoise. Les villes sont animées, beaucoup de petits commerces, des vendeurs ambulants, il y a du monde dans les rues et beaucoup d’entre eux me regarde un peu comme un extra-terrestre. Mais je ne savais pas pour tout ce monde au début, mais une amie m’a appris plus tard que le Henan est la province la plus peuplée de la Chine.
J’arrive donc de bon matin à Kaifeng, je descend du train et me voilà un peu perdu au milieu de la foule. J’avais planifié à moitié mon arrivé, c'est-à-dire que j’avais réservé un lit à l’auberge de jeunesse en avance, mais je ne savais pas où était cette fameuse auberge ! Kaifeng, c’est une petite ville de province qui a toutefois 4 600 000 habitants ! Je prends un bus qui m’emmène au centre ville, je longe un lac, de bon matin il y a des personnes âgées qui font leur gymnastique. C’est vraiment rigolo, en France, il y a des jardins d’enfants avec des structures d’éveil, en Chine, ce sont de vrais jardins de personnes âgées. Peu après, je descends du bus, je m’approche d’un plan, mais il est entièrement en caractère chinois. Finalement, un jeune chinois me propose spontanément son aide. Nous demandons l’adresse à une dame policière, puis, à califourchon sur le porte bagage de son vélo, il m’emmène jusqu’à l’auberge. Je fais un peu connaissance avec l’aubergiste, puis je m’en vais découvrir la ville.
Pavillon du Dragon. J'aime bien la photo de l'acteur qui joue sérieusement son rôle à côté de la touriste chinoise buvant son soda !
Kaifeng a servi de capitale à sept dynasties à partir du Ve siècle avant notre ère (époque des Royaumes combattants) jusqu’à la dynastie des Songs (960-1126). Au XIe siècle, la ville était un centre commercial et industriel majeur, avec une population comprise entre 600 000 et 700 000 habitants, c’était probablement la plus grande ville du monde à cette époque. Aujourd’hui encore, la ville est fortifiée. De plus, il n’y a pas d’immense building à Kaifeng, la hauteur des bâtiments est plus semblable aux standards européens, et il y a même quelques voies piétonnes ce qui rend la visite agréable.
Parmi les sites d’intérêts que j’ai visité, il y a le temple Daxiangguo, qui a été fondé en 555, mais détruit et reconstruit plusieurs fois depuis cette date. Le pavillon du dragon est, quant à lui, sur le site original du palais impérial de la dynastie des Song du Nord. C’est un gros bâtiment dont on peut faire l’ascension par un escalier, à la manière d’un temple maya. Au sommet il y a une vue sur la ville. J’ai assisté à une représentation théâtrale d’un épisode de l’histoire de la ville, les acteurs sont en costume d’époque (laquelle ?). C’était du chinois alors je n’ai pas vraiment compris ! Plus loin, il y a un parc, avec un autre temple, mais la principale attraction est la "Pagode de fer", construite en 1049. Haute de 55 m, elle est enveloppée de tuile de couleur marron rouille lui donnant un aspect en fer.
Temples à Kaifeng
Il y a une réelle vie nocturne à Kaifeng. Tous les soirs des restaurants en plein air s’installent ce qui n’est pas sans rappeler la place Jemaa el fna au Maroc. D’ailleurs, il y a une communauté musulmane qui vit ici. Il y a également des marchés de nuit.
Marché de nuit à Kaifeng

J’ai passé deux jours à Kaifeng puis je voulais explorer la campagne, en fait un site particulier un peu bucolique : Guoliangcun. C’est un village de 300 habitants perché sur la montagne Wanxian (les 10 000 immortels) dans le nord du Henan.
Sur la carte, ça ne paressait pas très loin de Kaifeng, mais il faut une journée pour s’y rendre. Je prends le train pour Xinxiang, une grosse ville qui n’a rien à offrir en apparence mais que j’ai aimé justement pour observer la vie quotidienne des habitants. De là, je dois prendre un bus pour Huixian, une petite ville. Ce n’est pas facile, je me fais trimbaler d’une rue à une autre pour trouver le bon endroit où va s’arrêter le bus. Puis il faut attendre du bon côté de la route, sinon je vais aller dans la direction opposée ! Bien sûr la destination finale du bus est écrite en chinois, il faut la déchiffrer, et elle ne correspond pas forcément à la ville où je souhaite descendre pour prendre ma correspondance. Bien sûr je peux demander de l’aide à quelqu’un qui ne parle pas un mot d'anglais, mais le plus souvent, ma prononciation de la ville que je souhaite rejoindre n’est pas bonne ce qui peut aboutir à des situations délicates ou rigolotes. Il faut être patient, cela me rappelle un épisode de j’irai dormir chez vous ou Antoine souhaite prendre le bus en Grèce ! (le lien devrait démarrer à la séquence en question). J’arrive finalement à bon port où je dois enfin prendre un autre minibus pour Guoliangcun. C’est rigolo, parce que la taille des bus diminue en fonction de la taille de la ville d’arrivée (notez que cette corrélation est inversée dans le sens du retour). Nous voilà tous entassé et nous commençons notre migration à travers les routes chaotiques de campagne. Le village est longtemps resté protégé du monde extérieur en raison de sa difficulté d’accès. Ce n’est bien sûr plus vrai maintenant car le site attire des touristes chinois et il est possible de trouver des hébergements, mais sans toutefois être envahi par le tourisme de masse.
Guoliangcun
La particularité de Guoliangcun, c’est que la route pour s’y rendre est sculptée dans la montagne, creusée dans la falaise. Malheureusement, j’ai eu beaucoup de pluie pendant les deux jours où je suis resté dans ce village; les nuages et le manque de lumière ont gâché la vue sur les montagnes environnantes qui semblaient intéressantes. C’est toutefois armé de mon parapluie, dans cette atmosphère brumeuse et cette esthétique aquarelle que j’ai exploré les environs. J’aime aussi lire dans le paysage les traces du passé, le contexte géologique qui a permis la formation de ce panorama. La falaise est impressionnante, avec cette roche rose ou ocre, cette accumulation de roche sédimentaire nettement visible de par ses stratifications. C’est un peu le Grand Canyon local.
Il y a 500 millions d’années, il faut imaginer que le site était sous les mers et par endroit, je peux voir l’empreinte des vagues sur l’ancienne plage; en géologie, on les appelle les ripple-mark. Parmi les autres merveilles géologiques du site, je peux visiter une grotte : les stalactites et les stalagmites sont éclairées par des torches de différentes couleurs donnant une atmosphère kitch à l’extrême au lieu ! Un peu plus loin, il y a aussi une cascade qui dégringole dans un petit étang. Malheureusement, attiré par la gravité, de plus en plus de gouttes tombent du ciel vers le sol, et toute cette eau ne provient pas uniquement de la cascade, mais c'est la pluie qui joue des claquettes de plus en plus fort. Il est temps d’aller prendre un bus pour voir ce que le Henan a à offrir un peu plus à l’ouest.
Mais d'ici là, vous pouvez voir plus de photos de ma visite du Henan par ici. A bientôt.

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