Le 1er novembre, c’est férié et ça tombe un jeudi, les conditions idéales pour organiser un long weekend en Europe. Mercredi soir je prends le bus à Paris porte de Gallieni et je me retrouve à Prague le jeudi matin vers 9h30. Je peux me rendre directement dans la vielle ville et aller voir le célébre pont Charles (ou Karlův most) qui enjambe la Vltava. Pour ce faire, je dois prendre un vieux tramway et c'est rigolo. Je peux faire connaissance avec toute une ribambelle de personnage sous forme de statues noircies, telle une haie d’honneur pour m’accueillir. Tout d’abord le nom du pont est en hommage à Charles IV, le souverain qui accéda au trône de Bohême en 1346, puis à celui du Saint Empire en 1355. Grâce à des réformes, il fit de la Bohême un des États les plus avancés en Europe à son époque. A Prague, on lui doit la construction du fameux pont, mais aussi la cathédrale Saint-Guy, la rénovation du château et l’agrandissement de la ville. La plupart des statues sont des représentations de divinités ou saints (pour moi le christianisme est un polythéisme vrai). La plus importante est Jean Népomucène. C’était un prêtre qui après divers conflits avec Venceslas IV (le successeur de Charles) fut jeté dans la Vltava. Après sa noyade, une couronne à cinq étoiles serait apparue au dessus de son corps. Il est ainsi devenu une divinité et un culte important lui était voué à travers tous le pays. Aujourd’hui encore, toucher sa représentation porterait bonheur et de nombreux passants s’amusent à lustrer le pauvre Népomucène qui tombe à l’eau. Sur le plan politique, le culte a aussi été mis en place afin de limiter le culte envers une divinité concurrente : Jean Hus. Il était un prédicateur et réformateur du XVe siècle qui avait un grand nombre de partisans : les Hussites. Ces idées étant perçues comme subversives, le pauvre Hus fut excommunié, condamné pour hérésie et brûlé sur le bûcher. On ne rigolait pas à l’époque, ils n’y allaient pas avec le dos de la main morte !
Dans l’histoire mouvementée et les conflits politiques de Prague, il y a une autre caractéristique : les défenestrations. Vous êtes fâchés avec votre voisin, balancez-le donc par la fenêtre. La première défenestration date de 1419 lors d’un différent qui aurait mal tourné entre catholique et hussite. La deuxième défenestration qui date de 1618 était moins grave pour les défenestrés (ils ont survécu en atterrissant sur un tas de fumier) mais elle conduit à une catastrophe européenne. En effet, à cette époque l’Europe ne méritait pas encore le prix Nobel de la paix : des conflits religieux, des tentations hégémoniques ou d’indépendance, des rivalités commerciales, des ambitions personnelles et jalousies familiales entraînaient des tensions, mais cette défenestration de Prague fut la cerise qui fait déborder le vase ! Elle est à l’origine de la guerre de trente ans, de 1618 à 1648, qui dévasta l’Europe, entre les Habsbourgs d’Espagne et du Saint Empire Germanique catholiques contre les États allemands protestants du Saint Empire, avec une participation des Royaumes de la Suède et du Danemark, de la France qui s’engage avec Louis XIII et Richelieu en faveur des protestants, dans ce cas là, pour des raisons géopolitiques. Bref, un beau bordel! Sans me prendre pour une vessie, j’espère que j’aurais éclairé la lanterne de ma maman avec cette péripétie de l’histoire européenne.
L’histoire de Prague est aussi riche que ses églises sont chargées ! Mais beaucoup d’encres à coulé sous les ponts depuis ce temps là. Moi je traverse le pont Charles et je crois que la suite du voyage fera l’objet du prochain article.
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